Nantes s’interroge sur le tourisme du futur, mais pas sur les fausses routes du passé

Le Voyage à Nantes organise les 6 et 7 septembre, à la Cité des congrès de Nantes, un colloque intitulé « Le tourisme du futur ». Que Jean Blaise se préoccupe de l’avenir, plutôt obscur en effet, c’est normal. Mais la formule choisie laisse sceptique.

« Si ton institution ne sait plus quoi faire pour qu’on parle d’elle, organise un colloque » : le dicton est vieux comme les relations publiques. L’industrie de l’événementiel en a fait un filon lucratif. Un colloque (forum, atelier, table ronde, séminaire, congrès, rencontres, assises, carrefour, symposium – barrer les mentions inutiles) permet de faire parler autrui quand on n’a plus rien à dire. Il peut aussi servir à :

  • occuper le personnel si l’activité courante n’est pas florissante,
  • remplir des salles de réunion non réservées,
  • accorder ou obtenir des renvois d’ascenseur,
  • rémunérer quelques amis et relations utiles (un journaliste n’aime pas faire de la peine à qui lui a commandé un « ménage » bien payé).

Quels que soient son ou ses objectifs, ce colloque nantais est étrangement positionné. Un colloque international se prépare normalement un an à l’avance. Sur l’antenne d’Euradio, en février, Jean Blaise l’avait annoncé pour le mois de mai. Puis, début juin, la date a ripé vers les 6 et 7 septembre. Trois mois de préavis, c’est trop court pour attirer à Nantes, en pleine période de rentrée, des personnalités aux emplois du temps chargés.

Qui craint la surabondance de touristes ?

Heureusement, Jean Blaise a un carnet de chèques et des relations. Il a confié l’animation du colloque au sociologue Jean Viard, un habitué de ce genre d’exercice mais surtout un vieil ami avec lequel il a rédigé un livre, Remettre le poireau à l’endroit (une histoire de culture, comme son nom l’indique). Comme le monde est petit, Viard en est aussi l’éditeur. Il y aura aussi l’indispensable critique d’art, Jean de Loisy. Pas un expert en tourisme, mais lui aussi un vieux complice de Jean Blaise. Ces Tri Yann là sont-ils réunis pour leur dernière représentation ? Pas sûr.

Jean Blaise a aussi invité la maire de Barcelone. Elle a délégué son adjoint au tourisme pour parler des inconvénients d’un trop grand afflux de touristes ; Nantes ne paraît pas directement menacée. Airbus a envoyé un cadre supérieur chargé des affaires publiques (c’est-à-dire en général des causettes distinguées), la SNCF sa brillante directrice du TGV Atlantique, le Louvre son directeur des relations extérieures. S’exprimeront aussi plusieurs conseils qui font métier de vendre leurs idées sur le tourisme, une journaliste québécoise, un philosophe et une anthropologue.

Le programme a été composé en fonction des personnalités dont on a pu obtenir la participation. Résultat, il part dans tous les sens. C’est un écueil classique. En général, les pros de l’événementiel réussissent à simuler une certaine unité. Ici, on n’a même pas fait semblant. En une journée et demie, le colloque prétend répondre à des questions (« Que devient le Louvre sans les Chinois ? Décidons-nous d’attendre la réalisation de l’avion électrique et du paquebot à voile d’ici 15 ans pour renouer avec le grand international ? »…) dont le rapport avec Nantes ne saute pas aux yeux.

Repartir de zéro, ou de pas grand chose

Le colloque fait l’objet d’un dossier de presse agréablement illustré par Frap, le caricaturiste du quotidien Presse Océan (dont, en revanche, l’affiche style Tintin au Congo a été envoyée aux oubliettes). Hélas, les retombées presse sont insignifiantes à ce jour. Le colloque demeure nanto-nantais. Peut-être était-ce le but, d’ailleurs ‑ parler d’avenir pour dissimuler un présent peu glorieux.

Beaucoup de gens se penchent sur le tourisme du futur. Les initiatives se multiplient. Le département de l’Hérault a lancé un dispositif d’aide à l’équipement technologique des acteurs du tourisme. Il s’appelle HERON. Ça ne s’invente pas. Mais que peut dire Nantes ? Avec les yeux éternellement plissés et les fossettes figées d’une statuette de Bouddha, Jean Blaise semble hors du temps. En le présentant, on commence par dire rituellement : « le créateur des Allumées ». Les Allumées : trente ans déjà… Pendant tout ce temps-là, on nous a parlé avec force superlatifs du bel avenir touristique de Nantes. Et voilà que le futur reste à inventer…

Sven Jelure

2 réponses sur “Nantes s’interroge sur le tourisme du futur, mais pas sur les fausses routes du passé”

  1. Merci. Vous avez raison sur le premier point, pas sur le second. En fait, je m’appuie toujours sur des sources disponibles. Des photos de l’intéressé, par exemple !

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