L’annonce de l’abandon « définitif » du projet d’Arbre aux Hérons a été géré de la pire manière possible entre Johanna Rolland et Yann Trichard. Ils auraient pu dire que, tout bien considéré, l’impossibilité de réaliser le projet était confirmée. Or c’est l’inverse ! On parie que ça n’est pas terminé ?
La deuxième mort de l’Arbre aux Hérons, ce 15 septembre 2023, jette une lumière impitoyable sur la première, celle du 15 septembre 2022. Réaliser l’Arbre coûterait trop cher, disaient alors Johanna Rolland et son premier vice-président, Fabrice Roussel. Et que dit Nantes Métropole aujourd’hui ? Que le groupe constitué autour de Yann Trichard, président de la chambre de commerce et d’industrie, pour étudier une réalisation privée de l’Arbre « a démontré la faisabilité économique du projet » (sic).
Étonnant aveu ! Ainsi, les arguments économiques de 2022 étaient faux : ils ne justifiaient pas l’abandon du projet. Comme nous l’avions d’ailleurs démontré à l’époque. Ou du moins, le secteur privé se montre plus efficient que le secteur public : belle révélation favorisée par une maire socialiste.
Puisque finalement le problème n’est pas financier, Johanna Rolland allègue aujourd’hui des risques juridiques. Pas des impossibilités : des risques. Des risques, les collectivités locales en prennent tous les jours. Elles les gèrent de manière à les réduire ou à les éliminer. Et l’on ne saurait pas faire ça à Nantes ? L’argument de 2023 paraît d’ailleurs aussi fragile que celui de 2022.
Mettez-les en concurrence
Premièrement, dit Johanna Rolland, « un tel montage [celui de Yann Trichard] dans la carrière Miséry présentait des risques juridiques quant à sa légalité, en particulier par l’absence de mise en concurrence s’agissant du domaine public ». Elle est bien bonne ! Nantes Métropole a toujours prétendu construire l’Arbre aux Hérons sans mise en concurrence. Ses dépenses effectuées à ce jour autour du projet, y compris la construction du héron prototype, l’ont presque toutes été sans mise en concurrence. Il y en a pour plusieurs millions d’euros. Et cela poserait un problème à présent ?
Eh ! bien, en ce cas, la solution est simple : que Nantes Métropole mette le projet en concurrence ! Yann Trichard et consorts ont travaillé pendant un an sur leur projet : on verra bien si d’autres sont capables de faire mieux en quelques semaines. Et si par extraordinaire c’est le cas, c’est-à-dire si d’autres acteurs proposent des conditions plus favorables pour la collectivité, ce sera tout bénéfice pour les Nantais !
Le deuxième risque juridique concerne justement les études déjà effectuées : « la possibilité de réutilisation des études financées par la puissance publique au bénéfice d’un porteur de projet privé soulevait également une insécurité juridique ». La propriété intellectuelle des études appartient soit à la collectivité qui les a commandées, soit aux auteurs qui les ont réalisées. La question est normalement réglée par les contrats de marchés publics (CCAP). Si elle ne l’est pas en l’occurrence, les services de Nantes Métropole ont mal fait leur travail.
Reprendre le projet là où il était resté ?
Et si Nantes Métropole est propriétaire des études, elle en fait ce qu’elle veut. Il serait un peu fort de café qu’elle préfère les mettre à la poubelle plutôt que d’en faire bénéficier le chevalier blanc de l’Arbre aux Hérons ! Mais supposons que le contenu des études reste la propriété des prestataires qui les ont réalisées. Ces prestataires sont essentiellement le groupement François Delarozière, Pierre Orefice et la Compagnie La Machine. Or personne ne désire plus qu’eux que l’Arbre se fasse !
(Nantes Métropole évoque par ailleurs la difficulté d’une implantation sur un site de rechange. Mais puisque rien n’empêcherait une installation dans la carrière de Miséry, la question d’un déménagement ne se pose pas réellement. Notons quand même que, le problème invoqué, cette fois, était d’assurer la sécurité des visiteurs « compte tenu notamment de la proximité immédiate de la Loire ». Comme si Les Machines de l’île n’étaient pas installées au bord de la Loire !)
Dernier mystère : puisque les « risques juridiques » allégués n’existent que si le projet est réalisé par des investisseurs privés et que ceux-ci ont « démontré la faisabilité économique du projet », pourquoi ne pas relancer le dossier tel qu’il était prévu au départ, tout simplement ? Incontestablement, il manque une pièce au dossier, une vraie raison de ne pas réaliser le projet. Johanna Rolland va devoir tuer l’Arbre aux Hérons une troisième fois.
Sven Jelure
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