Et c’est reparti pour un tour ! La presse nantaise tente d’expliquer pourquoi le conseil de Nantes Métropole n’examinera pas le dossier de l’Arbre aux Hérons en février, contrairement au calendrier prévu.
Promis, il reviendra-z-à Pâques, mironton, mironton, mirontaine, ou à la Trinité (ter). En attendant, si le Héron hue (oui, le cri du héron s’appelle un « huement »), est en retour hué par les signataires d’une pétition réclamant l’abandon du projet.
Les protagonistes du feuilleton en profitent ces jours-ci pour glisser quelques « informations » pas toutes bien franches du collier.
Karine Daniel, directrice du Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons :
- « Il y a une nouvelle procédure pour les achats d’œuvres installées dans le domaine public. Ce sont les analyses longues. Cela prend plus de temps que prévu. » L’article R2122-3 du code de la commande publique, dans sa rédaction actuelle, est en vigueur depuis le 1er avril 2019. Il ne compte que 163 mots. Trop pour qu’on les analyse en deux ans et dix mois ?
- Quant aux dons des mécènes, « tout va s’accélérer dès que l’achat de l’œuvre sera voté au conseil métropolitain ». Autrement dit, demain, on rasera payant : votons sans avoir l’argent, et l’argent viendra. Un acte de foi juridiquement et financièrement acrobatique ! On cherche des mécènes depuis longtemps. En juillet 2016, 2 millions d’euros avaient déjà été collectés, proclamait Johanna Rolland. On en est à 6,5. On a donc trouvé 4,5 millions de plus en cinq ans et demi. À ce rythme, compte tenu des frais de collecte (les services d’une ancienne députée ne sont pas gratuits), le budget de 17,5 millions serait bouclé dans une quinzaine d’années. Sous réserve qu’il ne dérape pas davantage, bien sûr.
- On compte 58 entreprises mécènes. Nantes Plus l’a déjà noté, ce nombre était annoncé sur Facebook dès le 20 novembre 2020. En revanche, un document adressé aux donateurs du Fonds de dotation en novembre 2021 n’en dénombrait plus que 51. Tout comme, à ce jour, la liste des mécènes affichée sur le site web du fonds de dotation. On avancerait donc à reculons !
- « Intermarché et Crédit Mutuel sont les deux mécènes les plus importants. Ils ont apporté entre 500 000 et 1 million d’euros chacun. » Voici deux ans et demi, Karine Daniel affirmait pourtant à Emmanuel Guimard que « le plus gros donateur, fermement engagé, éta(i)t le Crédit mutuel Laco », pour 1,5 million d’euros. Il n’était donc pas si « fermement engagé » que ça ?
Fabrice Roussel, vice-président de Nantes Métropole chargé du tourisme et des équipements culturels :
- La Métropole attend un feu vert de Bercy pour passer commande. C’est la faute au gouvernement ! Certes, il peut donner un avis. Mais pas enfreindre la loi. En cas de problème, le dossier passerait aux mains de la justice. Éric Piolle, maire de Grenoble, en sait quelque chose : il comparaîtra devant le tribunal correctionnel de Valence le 1er mars pour une affaire assez comparable (un spectacle « exclusif » commandé à un prestataire sans appel d’offres) quoique d’un montant cinquante fois inférieur. Johanna Rolland pourrait préférer attendre de voir comment son collègue s’en sort. D’autant plus que la police judiciaire enquête déjà sur les conditions de réalisation du Carrousel des mondes marins.
- La Métropole « doit passer un marché avec la compagnie La Machine pour la réalisation de cette œuvre ». Et de là vient le problème. Il paraît que MM. Orefice et Delarozière refusent tout appel d’offres. (Qui commande donc ici ?) La loi le permet, par dérogation, pour les œuvres d’art. Mais l’administration refuse qu’on en profite pour considérer comme « artistique » jusqu’au dernier boulon utilisé dans la construction… Pour éviter le blocage, il suffirait d’acheter les boulons et le reste en respectant la transparence exigée par le droit commun. La vrai question est : pourquoi tient-on à faire autrement ?
Carine Chesneau, présidente du Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons
- Bruno Hug de Larauze a quitté la présidence d’un Fonds de dotation créé en 2017 pour collecter près de 12 millions d’euros à destination d’un Arbre à construire en 2021/2022, et qui n’en est qu’à 6,5 millions sans que le premier coup de pioche ait été donné. La présidence est passée à Carine Chesneau. Celle-ci « annonce qu’elle sera aussi mécène de l’Arbre aux hérons ». En réalité, elle l’a été et ne l’est plus ! Son entreprise, Lambert Manufil a été inscrite à la mi-novembre 2021 dans la liste les mécènes de L’Arbre aux Hérons, et en a été retirée début janvier 2022. Raison probable : les mécènes peuvent déduire 60 % de leurs dons de leurs impôts (s’ils versent 1 million d’euros d’une main, il récupèrent 0,6 million de l’autre), mais encore faut-il qu’ils paient des impôts, or Lambert Manufil a connu une série de mauvaises années.
Sven Jelure
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