“Les transports de demain s’inventent à Nantes Métropole…” Voilà ce qu’annonce un communiqué très officiel de l’agglomération nantaise. De quoi s’agit-il ? D’une nouvelle phase de tests d’une navette autonome. De la métropole lancée dans une course au “plus”, ça mérite bien un roulement de tambour. Sauf que la réalité est un peu moins flatteuse : des navettes autonomes circulent déjà, depuis quelques années, en France. Et un peu partout dans le monde.
À en croire pourtant le texte triomphant de Nantes-Métropole, les tests de ce “nouveau mode de transport intelligent et respectueux de l’environnement” confirmeraient que Nantes est bien cette “ville pionnière de l’innovation et de la transition énergétique”. Une ville forcément “innovante et collaborative” (sic) appelée à servir d’exemple aux autres métropoles.
Celles et ceux qui n’ont pas tout à fait perdu la mémoire se souviennent que cette navette autonome (ou sa petite sœur) a déjà été testée… à Nantes. Lors de l’opération, elle aussi, exemplaire et baptisée à grands frais Complètement Nantes, cette première navette a circulé, en juin 2018, entre la station Gare maritime et la carrière Misery. Un parcours de 650 mètres effectué à la vitesse moyenne, proprement affolante, de 10km/heure ! Selon les chiffres de Nantes- Métropole, non vérifiables donc incontestables, l’engin aurait ainsi transporté, en un mois, 5 200 personnes. Un franc succès puisque ce chiffre a été obtenu en 1029 voyages. Ce qui nous fait donc un peu plus de 5 passagers par voyage – et 669 km parcourus, l’équivalent de 15,5 fois le tour du périphérique nantais.
Il y a donc près d’un an, Nantes inventait déjà “les transports de demain”. Autant dire que cette navette autonome 2019, “sans chauffeur et 100% électrique”, a des allures de déjà vue. Reste qu’il s’agit, cette fois, de la tester dans “des conditions de circulation réelle”. Second roulement de tambour dont la presse est chargée de se faire l’écho. Et puisqu’il s’agit d’aller toujours plus loin, cette année, l’expérimentation quitte les quais de Loire pour la zone d’activités aéroportuaires. Ces nouveaux tests sont censés valider “quatre innovations” techniques, présentées dans le communiqué officiel.
Toute cette littérature nous ferait presque oublier que Nantes a déjà quelques longueurs de retard concernant ce mode de transport. Des navettes autonomes circulent déjà dans plusieurs villes de France. Sans parler de celles qui sont en circulation aux Etats-Unis. C’est dans le Michigan que le constructeur français Navya a testé sa navette en 2016. Avant sa mise en service à Las Vegas. On trouve également des navettes autonomes à Sydney ou Singapour ce qui a dû échapper à Francky Trichet, le “monsieur tech” de Johanna Rolland.
Ce qui n’empêche pas les “cocoricos” franco-français. Au printemps 2017, Anne Hidalgo se félicitait d’une “première mondiale” et d’une “révolution des transports” en présentant la navette autonome de La Défense. L’automne dernier, c’est l’agglomération lyonnaise qui annonçait “une première expérimentation d’une navette autonome en route ouverte”. Et cette navette lyonnaise, circulant à 25km/heure (contre 20 à celle de Nantes !) pouvait profiter de l’expérience d’une autre navette, elle aussi lyonnaise, mise en circulation en… 2016, pour relier le quartier Confluence. Libération parlait alors d’une “première mondiale”.
Conclusion : à défaut d’inventer vraiment “les transports de demain”, Nantes Métropole pourrait en faire un peu plus concernant les transports d’aujourd’hui. Ce qui ne serait pas si mal.
Julien Craque
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