L’armée mexicaine derrière JR
Voilà donc reconstitué le duo Rolland-Laernoes à la barre de l’exécutif nantais. Comme un remake de Viva Maria ! Dans le film de Louis Malle, Bardot et Moreau faisaient une révolution d’opérette en Amérique du sud. Sur fond de musique et de chansons (!) au texte prémonitoire :
« La tête, y en a qu’une, ah non, y en a deux… ». Comme un air de déjà vu pour les Nantais… Alors, Viva Johanna ?
« Près de 60 % des Nantaises et des Nantais ont choisi la liste Ensemble Nantes en confiance… ». À peine enregistrés les résultats (sans surprise…) du second tour des municipales nantaises, Johanna Rolland fêtait ce plébiscite sur Facebook et Twitter. Un triomphe, vraiment ? S’il y avait bien quelques commentateurs à faire grise mine devant un taux record d’abstentions, personne n’a osé indiquer à Mme la maire qu’elle venait d’être confortablement élue par… 17,85% des électeurs inscrits ! Personne non plus n’a osé contredire Pascal Bolo, sur le plateau de Télénantes, lorsqu’il a évoqué “la dynamique de l’union”. Une dynamique si spectaculaire que le duo Rolland-Laernoes a fait moins bien que les deux têtes de listes, séparément, au premier tour. Ce 28 juin au soir, il manquait quelque 3000 voix à la liste d’union. Une performance que, seule, Valérie Oppelt a égalée. C’est dire l’impact de la dynamique… Ne soyons pas cruels et ne rappelons pas, non plus, à l’heureuse élue qu’elle a perdu près de 18 000 voix (17 883 précisément) entre 2014 et 2020.
Non technocrates, s’abstenir
Malgré l’abstention record, la liste Rolland-Laernoes dispose d’une majorité très confortable, tant à la Ville qu’à la Métropole. Une majorité amplement suffisante pour régner sans partage. Personne n’ayant vraiment pris le temps d’éplucher les 323 engagements de la liste (cf “Le duo qui vous en promet plus”), on n’en voudra pas aux observateurs politiques locaux de ne pas commenter davantage la répartition des postes et l’intitulé des délégations et responsabilités des élus.
Les anciens parleraient de sabir. En 2020, place à la novlangue, chère à Orwell. Un langage que seuls comprennent vraiment ceux qui le parlent. Un langage de l’entre-soi qui ne manquerait pas d’inspirer à Molière une version contemporaine de son Bourgeois. Non technocrates, s’abstenir.
Moins les responsabilités sont importantes, plus il convient que le titre soit ronflant. À défaut de décrocher le poste de première adjointe, Julie Laernoes se voit ainsi “en charge de la prospective et de la résilience”. L’ex-tête de liste des Verts est donc censée plancher sur les prévisions économiques à long terme. Ça, c’est la prospective mais quid de la résilience ? De quel traumatisme doit-elle nous aider à nous remettre ? Ou bien s’agit-il, pour elle, de se remettre d’un score au premier tour très en deça de ses ambitions ?
La longue liste des délégations est une succession de formules dignes d’une comédie de boulevard. Il y a ainsi un adjoint aux sports (Ali Rebouh) mais il convenait d’adjoindre à l’adjoint un conseiller en charge des pratiques sportives libres (Francky Trichet) et une autre en charge du développement du sport au féminin (Émilie Bourdon)… On trouve aussi une élue “en charge de la mixité dans l’emploi”, un autre “de la ville du ¼ d’heure et de la logistique du dernier kilomètre” (sic), un autre du “territoire zéro chômeur de longue durée”, un autre “en charge de l’animal dans la ville”, un autre est chargé de veiller à la quotidienneté … On aurait pu imaginer pour Christophe Jouin, co-fondateur de L’autre cantine et “enfarineur” de Johanna Rolland, une délégation aux desserts des cantines scolaires… il hérite des dossiers santé et précarité. Enfin, on trouve un élu “délégué au développement des cultures potagères”. Ça ne s’invente pas.
Officiers et petits soldats
26 adjoints, pas un de moins : Johanna Rolland sera bien épaulée. La voilà à la tête d’une véritable armée mexicaine. De quoi amuser la galerie. En réalité, peu de changements à attendre de cette nouvelle équipe municipale tant elle ressemble, dans sa structure, à celle qui était aux affaires depuis 2014. Même si Madame la maire a dû composer avec ses alliés verts et faire quelques concessions qui ont fait grincer quelques dents dans son propre camp. Comme l’abandon de l’extension de la Cité des congrès, serpent de mer ou patate chaude au choix, qui refait surface tous les six ans. Ou encore le parking souterrain de la Petite Hollande dans le cadre du réaménagement de ce vaste espace entre Kervégan et la Loire. Et que dire du projet de transfert du CHU… Les sujets de friction ne manqueront pas au cours des six ans qui viennent.
Pour “tenir la baraque”, Johanna Rolland pour s’appuyer sur quelques grognards, fidèles par conviction ou par intérêt. Son premier adjoint Bassem Asseh, qui cumule les responsabilités de la proximité, du dialogue citoyen, de la politique de la ville, du monde économique et de l’emploi, bénéficie du recul de Pascal Bolo dans l’organigramme municipal. Ce dernier paie sans doute sa proximité avec Jean-Marc Ayrault mais aussi l’imbroglio et l’échec de l’opération YelloPark. S’il n’est plus que 7e adjoint, Pascal Bolo n’en cumule pas moins la sécurité, la tranquillité publique, les finances, l’évaluation des politiques publiques, les affaires générales, domaniales et juridiques… Non seulement il garde les cordons de la bourse mais c’est lui qui donnera les bonnes notes (ou non…) à ses petits camarades.
Le duo Rolland-Laernoes – où la rivalité le dispute à la complémentarité – semble paré pour un remake de Viva Maria. Un coup d’œil sur Wikipedia nous apprend que “pour la bataille, à la fin du film, on avait fait appel à de nombreux figurants… parmi eux il y avait des membres de bandes rivales qui en ont profité pour régler leurs comptes avec des balles réelles”. Résultat ? Des belles perdues (pas pour tout le monde !) et quelques blessés ». Voilà qui nous promet des conseils municipaux et métropolitains explosifs. Du boulot en perspective pour l’adjoint en charge de la sécurité, un certain… Pascal Bolo !
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En plus de l’abstention massive, à noter un score faible mais étant le seul vote triplant ses suffrages entre les 2 tours:
les votes blancs 402 0,54% 1 277 0,67%
Excellent billet ! Juste une petite remarque en passant : contrairement à ce que vous dites, vous n’êtes pas les premiers et les seuls à souligner le score de JR par rapport aux inscrits (17,8%). Je l’ai modestement fait dès le lendemain matin sur les réseaux sociaux et surtout la presse quotidienne régionale n’a pas manqué d’en informer ses lecteurs.
et que dire du poste fictif de Le Teuff sur les « Enjeux bretons » … ?
Hâte de voir ses prochains votes sur l’avenir du FC Nantes et du stade de la Beaujoire tiens … 🙂 quand l’appât des postes est + chère que les convictions. Un beau profil bien politique ce Le Teuff !
Quel est l’objectif de cette délégation mis à part faire du lobbying pour réunifier la Loire-Atlantique à la Bretagne ? ça mérite un poste d’adjoint ça ? Visiblement, il ne souhaite même pas prendre en charge des questions de culture et d’enseignement liées à la Bretagne …