Ce jeudi, il y aura dix ans que Johanna Rolland est maire de Nantes. Jeudi, vous êtes sûr ? Elle a pourtant fêté cet anniversaire au début de la semaine dernière, avec interview à Ouest-France, tweet perso sur X, nombreuses reprises dans la presse de son bilan décennal
L’attachée territoriale qu’a été la maire de Nantes connaît sûrement par cœur le code général des collectivités territoriales : elle sait qu’on n’est pas maire avant d’avoir été élu par le conseil municipal. Or elle a été élue maire de Nantes le 4 avril 2014 et présidente de Nantes Métropole le 14. (Le second tour de l’élection municipale avait eu lieu le 30 mars, avec une participation franchement médiocre de 53,8 % contre 62,1 % au niveau national.)
Fêter un anniversaire avec une dizaine de jours d’avance, ça porte malheur, non ? Mais dans son cas, il est probable que fêter à bonne date lui aurait encore plus porté malheur. Elle pouvait se douter que des « bilans » de ses dix ans étaient en préparation. Ainsi, Médiacités allait passer en revue les 425 promesses de sa campagne électorale, et ses autofélicitations allaient marcher beaucoup moins bien, forcément.
En devançant l’appel, elle tente d’imposer ses propres vues sur sa décennie : toutes les critiques ont l’air d’arriver en retard alors que c’est elle qui est arrivée en avance et a saturé l’espace. Habile sur le plan de la com’, mais modérément honnête. Voilà une caractéristique de plus à inscrire à son passif : Johanna Rolland n’est pas hostile aux « vérités alternatives ».
Elle en parsème d’ailleurs le bilan établi par elle-même. Dans ce genre d’exercice, il faut toujours concéder un peu de négatif pour avoir l’air honnête. Ici, le réaménagement de la place du Commerce était une victime toute désignée : difficile de nier qu’il est raté, tout le monde peut le voir. C’est pas vraiment de ma faute, plaide pourtant Johanna Rolland entre les lignes. Elle a fait confiance à une paysagiste, qui s’est plantée dans les plantations. Le réaménagement a commencé par l’abattage de 70 grands arbres. Aurait-il donc été opéré à l’insu de la maire de Nantes ? Quant aux plantations, quand Nantes Métropole en annonçait 30 000, ce nombre comprenait 1 500 plants d’iris et… 29 621 graines de plantes vivaces ! Un platane presque centenaire en échange de 423 brins d’herbe, en somme. Trop occupée à établir le chèque de 30,3 millions d’euros pour payer les travaux, Johanna Rolland n’avait pas fait ce calcul.
Peut-on rattraper le coup ? Johanna Rolland va envisager des propositions d’amélioration. Pas rancunière, elle les a demandées à … la même paysagiste. Perseverare diabolicum : il y a dix ans que ça dure, ça peut bien en durer encore deux.
Sven Jelure
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Le désastre ne date pas d’hier : il est simplement plus visible à Commerce. Quand en 2011 Ayrault a construit sa « promenade nantaise » (remember?) du Chateau au 50 Otages, sur 21 platanes cinquantenaires, il en est resté 9 et le granit a bien chauffé depuis… Les halles du Bouffay de 1878 sont parties sans retour (sait-on d’ailleurs où elles sont ?). Sans parler de la stèle dédiée à Pontcallec et détruite dans les travaux (remplacée par un fac similé médiocre). J’ai encore souvenir de l’architecte Bruno Fortier nous toisant de toute sa hauteur pour nous expliquer que les alignements d’arbres c’était vraiment trop « bourgeois du XIXe » et qu’il fallait surtout que les touristes puissent voir les façades. La ville pour lui n’était qu’un décor de théatre. On est passé avec Ory de Marivaux à Beckett : nous attendons donc la nouvelle version de Godot
Merci de rappeler les errances des mandats « du plus grand maire de l’Histoire de Nantes, de la Ligérie, de l’Atlantique et du triangle des Bermudes ».
Alignement de platanes = bourgeois du XIXe ?
Mise en valeur des façades = pas bourgeois du XIXe ?
Encore une CSP+ qui coûterait moins cher au RSA.
La mise en valeur des façades est typiquement bourgeoise, seulement Nantes n’a justement jamais été dans cette démarche, restreignant au contraire parfois jusqu’au vice la largeur de ses artères. Ce qui sera entre autres un argument de poids pour les comblements de la Loire, l’Erdre (et la Chézine). Et pourtant, pour ça aussi à l’époque, il y avait des opposants. Un LU financera un projet de canalisation qu’on peut grandement regretter.
Quant aux alignements de platanes, c’est de l’hygiénisme très XIXe mais était-il bourgeois ?
Enfin, on notera que sans vergogne le prof d’allemand de collège public de banlieue ira prétendre que Nantes était une ville verte.
Ça oui, elle l’était mais beaucoup moins après qu’avant lui.
Et sans un coup de force d’un certain Nicolas Hulot qui a imposé l’écologie dans le débat politique, on peut imaginer que beaucoup plus d’arbres auraient été abattus, l’édile ne comprenant finalement rien à Nantes.
Et il a fini PM et ministre des Affaires Étrangères.
Comme quoi, on favorise les médiocres tout juste bon à suivre une feuille de route (déproletarisation et métropolisation testés et approuvés 20 ans avant ailleurs).
Et tout compte fait, il a certainement bien fait d’arrêter sa carrière de prof d’allemand de collège de public de banlieue : il n’en avait certainement pas les épaules.
Leurs projets sont chers et ratés mais ils peuvent en être fiers ; le résultat est à leur image.
Ça fait 35 ans que ça dure.
Et encore, il y a du progrès.
On a la clairvoyance de l’infaisabilité d’un projet et le courage de l’arrêter, même quand l’opposition est pour (ce que n’aurait jamais, jamais, jamais fait Ayrault, le socialiste qui plaisait tellement à la droite qu’il vivait -et votait- avec).
Et de reconnaître un échec tout en demandant une correction (bon, à la même personne pourtant clairement totalement dépassée dans son domaine professionnel mais bon, on ne se départit pas de la CCI en 10 ans non plus, en cherchant bien, on trouve pire que les politicards et les fonctionnaires).
Enfin bon, de là à ce que l’anniversaire soit joyeux…
Rien à dire sur la comédie politicienne des quartiers Nord où j’ai raté un épisode ?
Ou tellement caricatural qu’il n’y a même plus de place pour la satire ?