On aime presque tous les médailles, même quand elles sont en chocolat. Il en est toutefois qu’on préfère ne pas célébrer avec trop de faste. Ainsi, Nantes Métropole n’a pas fait grand cas du « Green Cities Award 2021 », un prix décerné en décembre qui récompense la création du « Jardin extraordinaire ».
Presse Océan s’étonnait l’autre jour de cette discrétion. « Serait-ce à cause de l’épineux dossier de l’Arbre aux hérons ? » s’interroge le quotidien nantais. Sans dire en quoi ce « dossier », quasiment un cold case à présent, interdirait de se réjouir d’un prix présenté comme prestigieux.
Un expert anonyme, mais peut-être pas si expert que ça, présente le prix comme « l’Eurovision des jardins ». N’exagérons rien. En 2021, il n’était décerné que pour la deuxième fois. Il a été créé par l’ENA – pas celle à laquelle on pense mais l’European Nurserystock Association, organisation professionnelle qui représente les intérêts des pépiniéristes européens. En 2020, il était allé à une petite ville belge, Beringen.
Bon nombre de groupes d’intérêt professionnels ont lancé leur propre prix. C’est un support d’opérations de relations publiques (« voyez comme on est beaux ! ») et souvent un renvoi d’ascenseur honorant un gros client. Lequel fait toujours l’étonné et affecte de croire qu’il a été choisi pour ses mérites et pas pour la facture qu’il a réglée.
Des prix destinés à ceux qui les décernent
Nantes Métropole, via Le Voyage à Nantes, ne dédaigne pas ce genre de frivolités. On se souvient du prix Green Capital, en 2013. Il avait été l’occasion de commander à François Delarozière un périple européen de son « Aéroflorale » (en fait trois exhibitions de cet échafaudage fleuri à Bruxelles, Hambourg et Turin), pas « green » du tout, à bord de gros semi-remorques au diesel. Encore ce prix-là était-il parrainé par l’Union européenne.
D’autres prix décernés à Nantes ne peuvent pas en dire autant comme, en 2011, le prix de la meilleure réalisation au Festival international du film touristique (FIFT) des offices du tourisme de Saverne et Kaysersberg, en 2012 le prix du jury des Rencontres du etourisme institutionnel ou, en 2013, l’un des treize prix Thea décernés par la Themed Entertainment Association (TEA), organisation internationale de fournisseurs de parcs à thème, qui comptait parmi ses adhérents l’artificier retenu l’année d’avant pour embraser le Carrousel des mondes marins.
Il est même arrivé au Voyage à Nantes de concourir officiellement pour l’une de ces « récompenses » destinées à faire valoir celui qui les décerne plus que celui qui les reçoit… et de se faire bananer ! En 2016, European Best Destination, société privée à but lucratif, lui avait proposé de s’aligner à l’un de ses palmarès annuels. Et Nantes avait mis un genou à terre devant Zadar, une petite ville croate. Concourir était déjà ridicule, échouer l’était bien davantage…
Pas plus d’arbre de Noël que d’Arbre aux Hérons
Mais pourquoi chipoter devant le « Green Cities Award » ? Johanna Rolland avait moins fait la fière en septembre dernier quand il s’était agi de recevoir le Grand prix du concours national des « Victoires du Paysage » au titre du même Jardin extraordinaire ! Ce prix était décerné par l’association VAL’HOR, organisation interprofessionnelle pour la valorisation des produits et des métiers de l’horticulture, de la fleuristerie et du paysage. Et de fait, Nantes avait bien mérité de l’interprofession puisque le jardin a été conçu par Phytolab, aménagé par Id Verde et fourni par les Pépinières du Val d’Erdre.
Or le monde est petit et les interprofessions gigognes : au jury des « Green Cities Award » figurait justement Catherine Muller, présidente de VAL’HOR. Nantes avait donc une amie dans la place ? Ce n’est pas si sûr, au fond. Après octobre est venu décembre. « Dans une société qui cherche ses repères, certaines traditions rassurent », a alors déclaré la présidente. « C’est le cas du Sapin de Noël qui guide les rêves vers une fin d’année heureuse ». Mais voilà : pour Johanna Rolland, le sapin de Noël est un sujet tabou. On comprend qu’elle ait préféré faire mine de rien voir…
Sven Jelure
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