Le Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons lit-il Nantes + ? Nous avions signalé le 1er juillet que la publication de ses comptes au Journal officiel était irrégulière : il y manquait la certification d’un commissaire aux comptes. Le Fonds vient de publier des comptes rectificatifs, désormais certifiés par Jean-Michel Picaud, président de RSM Ouest.
L’essentiel de son rapport, comme c’est la coutume dans la profession, est destiné à ouvrir le parapluie – « notre objectif est d’obtenir l’assurance raisonnable que les comptes annuels pris dans leur ensemble ne comportent pas d’anomalies significatives ». En gros, les comptes sont à peu près justes.
« Les comptes annuels ont été arrêtés par le président du conseil d’administration », note pourtant le commissaire aux comptes. N’est-ce pas là une anomalie ? L’article 6.4 des statuts du fonds spécifie que ses comptes sont approuvés par le conseil d’administration. Lequel comprend du beau monde : des représentants de Nantes Métropole, de la CCI de Nantes-Saint-Nazaire, du Medef, etc. Le président, Bruno Hug de Larauze, n’a pas à endosser toute la responsabilité des comptes.
La réserve la plus importante exprimée par le commissaire aux comptes est celle-ci : « comme précisé par l’article L823-10-1 du code de commerce, notre mission de certification des comptes ne consiste pas à garantir la viabilité ou la qualité de gestion du fonds de dotation ». Cette mention est classique. Mais elle ne dit pas tout. Si des événements, même postérieurs à la clôture de l’exercice, risquent de compromettre l’avenir, le commissaire aux comptes « attire l’attention des lecteurs » sur ce risque. Oh ! mais que lit-on à la première page du rapport ? « Nous attirons votre attention sur le point suivant […] concernant la demande de rescrit fiscal ».
C’est dit aussi obscurément que possible, mais c’est dit : intervenu en avril dernier, le rejet d’une demande de rescrit fiscal qui aurait permis aux entreprises de déduire de leurs impôts 60 % des sommes données au Fonds est un gros, gros pépin. Or, s’agissant d’un fonds de dotation, la loi exige du commissaire aux comptes un peu plus que « d’attirer l’attention » : s’il « relève, à l’occasion de l’exercice de sa mission, des faits de nature à compromettre la continuité de l’activité, il demande des explications au président du conseil d’administration ». Et, en l’absence de décisions qui permettraient de redresser la barre, il doit alerter le préfet. Le refus du rescrit fiscal est-il de nature à compromettre la continuité de l’activité ? La question est certainement posée.
Sven Jelure
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Bonjour,
Sans doute votre site est-il suivi de près par nos édiles — vos enquêtes étant très pointues et dignes des meilleurs sites d’investigation dignes de ce nom. Néanmoins, suite à la lecture de votre précédent article, et me présentant comme un simple habitant étonné, je me suis permis d’alerter e J.O et la Préfecture de l’irrégularité des comptes de « l’Arbre aux Hérons », tout en m’appuyant sur vos précieuses précisions… 😉
Si le but du Fonds de dotation était simplement de contribuer au financement du projet de l’Arbre aux Hérons, le refus du rescrit fiscal ne compromettrait pas l’avenir : il pourrait toujours récolter « quelque chose », ce qui serait mieux que rien.
Mais ses statuts sont explicites : il doit « Concevoir et mettre en oeuvre la stratégie de recherche de fonds privés d’entreprises, d’associations et de particuliers désireux de participer au financement de l’ « Arbre aux Hérons » », sachant que ces fonds doivent financer un tiers du projet, dont le coût prévisionnel est de 35M€ HT. Le refus du rescrit compromet évidemment cet objectif. Le commissaire aux comptes n’a donc pas le choix : il doit (il a dû…) lancer la procédure d’alerte prévue par la Loi.