Pourquoi les Machines de l’île devraient-elles rester sales pendant deux mois et demi cet automne ? Parce qu’un curieux cafouillage administratif du Voyage à Nantes les prive provisoirement du nettoyage que plusieurs entreprises étaient prêtes lui fournir.
Le Voyage à Nantes a des soucis immédiats de propreté. Au mois de mai, il se met en devoir de trouver un prestataire chargé de nettoyer l’atelier et la Galerie des Machines, l’Éléphant, la boutique, le Carrousel des Mondes Marins et le bâtiment voisin (la Déferlante), ainsi qu’un entrepôt à Saint Herblain. Le contrat précédent a été conclu pour quatre ans le 1er octobre 2020. Le Voyage à Nantes publie le 30 mai 2024 un avis de marché prévoyant le début des prestations le 2 octobre.
Puis quelqu’un, sans doute, s’avise que le contrat de 2020 s’achève le 30 septembre et non le 1er octobre. Le 12 juin, Le Voyage à Nantes publie un nouvel avis de marché/avis de changement. La « correction par l’acheteur » qui oblige à refaire la procédure est le remplacement de la date du 2 octobre par celle du 1er octobre. Pas question que Machines restent une journée sans nettoyage ! À part cela, l’avis est identique d’un bout à l’autre.
Pour un contrat de quatre ans, la valeur des services est estimée à 904.000 euros HT (un montant qui, à date, correspond au coût de neuf salariés à plein temps payés au SMIC). Cela laisse une belle marge d’augmentation puisque le contrat qui s’achève le 30 septembre s’élevait à 700.000 euros HT pour quatre ans. Sept entreprises sont intéressées, elles accomplissent tout le travail administratif nécessaire pour remplir leur dossier et le présenter dans le délai fixé.
Avec une chance sur sept d’être retenues ? Non, zéro chance sur sept. Le 20 août, Le Voyage à Nantes rejette tout le monde, puis publie le 4 septembre un avis de résultat indiquant : « Statut sélection lauréat: Aucun lauréat n’a été choisi et la mise en concurrence est clos. La raison pour laquelle un lauréat n’a pas été choisi: Décision de l’acheteur, en raison d’un changement des besoins ».
Les Machines de l’île n’auraient-elles plus besoin d’un nettoyage ? En fait, le « changement des besoins » est vite analysé : le même jour que l’avis de résultat négatif du 4 septembre, Le Voyage à Nantes publie un nouvel avis de marché. Il porte exactement sur les mêmes prestations, pour le même montant ! Loin de spécifier un « changement des besoins », il les confirme !
Cependant, le marché est intitulé cette fois « Marché de services de propreté et d’hygiène pour le site de la SPL Le Voyage à Nantes », et présente les prestations comme l’un des quatre lots d’un marché passé par Le Voyage à Nantes et portant aussi sur le château des ducs de Bretagne, sur les Nefs et sur le siège de la SPL, rue Crucy. De fait, Le Voyage à Nantes a déjà passé des marchés de nettoyage l’an dernier (y compris, à l’en croire, pour Les Machines de l’île !).
De l’intérêt de se relire
Or, surprise ! le premier avis de marché concernant les Machines, le 30 mai 2024, tout en traitant le nettoyage des Machines de l’île comme un marché à part entière, annonçait déjà dans son article 2.1.4 : « Le présent marché est décomposé en 4 marchés distincts : – Lot 1 : Château des Ducs de Bretagne et ses locaux annexes ; – Lot 2 : Machines de l’île et le Carrousel des Mondes Marins », etc., non sans spécifier quelques lignes plus bas que l’avis portait sur le « LOT-0001 Titre: Marché de services de propreté et d’hygiène pour les Machines de l’Ile et le Carrousel des Mondes Marins » ! La rédaction initiale était manifestement le fruit d’un gros cafouillage administratif.
Plus cocasse encore, l’avis du 12 juin, celui qui avançait la date de début du nettoyage au 1er octobre, était rédigé dans les mêmes termes ! C’est à se demander si la direction du Voyage à Nantes relit ses avis de marché avant de les publier – or on parle ici d’un budget de 904.000 euros, excusez du peu. Selon toute probabilité, le double embrouillamini n’a été découvert que le 20 août, lors de la commission des marchés, et l’on s’est empressé de remettre les choses à peu près d’aplomb en alléguant un « changement des besoins », comme une ardoise magique avant de recommencer la procédure en bon ordre.
Le Voyage à Nantes ne lit probablement pas Nantes Plus, et c’est dommage pour lui. Le 30 mai, le même jour que son premier avis de marché, nous avons signalé les « fautes de frappe à plusieurs millions d’euros » commises par la Samoa dans ses avis de marché. Cet article aurait dû inciter Jean Blaise à mieux vérifier les avis de ses propres services…
Les conséquences de ce cafouillage ne sont sans doute pas gravissimes : les sept entreprises intéressées n’auront qu’à recopier leur offre précédente. Mais évidemment, la Loire a passé sous les ponts ‑ or on doit respecter certains délai entre la publication des avis, la réception des offres et le début des prestations. En définitive, celles-ci ne devraient commencer ni le 1er octobre ni le 2 mais le 13 décembre, et encore faut-il pour cela déroger à la réglementation (article 13.1.1 du CCAG/FCS). Conclusion : entre le 1er octobre et le 13 décembre 2024, les Machines de l’île devraient rester sales.
Sven Jelure
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