Avant même la création du Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons ses initiateurs avaient pris soin de déposer le nom de domaine arbreauxhérons.fr. Puis ils l’ont laissé dormir un bon moment. Enfin, ce 22 novembre, un courriel adressé aux contributeurs de la campagne Kickstarter leur a annoncé l’ouverture du site.
L’ouverture officielle, du moins, car il était déjà accessible depuis un bout de temps. En fait, son état de finition aurait plutôt reculé. Au lieu d’un élégant vol de hérons animé en 3D, la page d’accueil affiche aujourd’hui un gros « 404 » (ce code http ne désigne pas une vieille Peugeot mais une page web inexistante ou introuvable).
Le site est peu fourni. Les donateurs de la campagne Kickstarter du printemps 2018 peuvent y afficher leur « titre de copartage »numéroté et nominatif. Il aurait dû être « vérifiable à tout moment sur le site des Machines de l’île » (la promesse figure encore en toutes lettres sur Kickstarter). Les lecteurs de Nantes Plus se souviennent que ces titres ont été ouverts à tous vents pendant un moment. À présent, il faut quand même déclarer à la fois son numéro de titre et son adresse électronique – mais celui qui voudrait afficher le titre de Pierre Orefice y parviendrait sans peine. La page n’est pas sécurisée, c’est écrit en rouge. Je m’inquiète un peu : mon titre de copartage est-il à la merci des cambrioleurs ?).
Quatre catégories de mécènes, dont une vide
La page vraiment intéressante est celle des mécènes. On se rappelle que l’Arbre aux Hérons doit être financé à hauteur d’un tiers, soit une douzaine de millions d’euros au compte actuel, par le secteur privé. Johanna Rolland compte que les entreprises se dévoueront. Depuis des mois, Pierre Orefice annonçait qu’au moins quarante mécènes s’étaient déclarés ; l’affirmation est encore visible sur le site de Nantes Métropole. Ils attendaient juste un rescrit fiscal grâce auquel ils pourraient déduire une partie de leur don de leurs impôts.
Ce rescrit a été délivré en juillet(1). Les mécènes n’avaient plus qu’à signer. On attendait avec curiosité et impatience la liste des 40 valeurs. Quatre mois plus tard, la liste est bien là, affichée sur le site. Les mécènes y sont répartis en quatre catégories selon l’importance de leur don :
- Héron Impérial (500.000 euros et plus)
- Héron Goliath (200.000 à 499.000 euros)
- Grand Héron (50.000 à 199.000 euros)
- Héron Cendré (5.000 à 49.000 euros)
En catégorie Héron Impérial, c’est simple : il n’y a que le Crédit Mutuel, engagé dans le projet depuis des années ; il aurait promis 1,5 million d’euros.
En catégorie Héron Goliath, c’est encore plus simple : personne.
La catégorie Grand Héron aligne Cryo-West (peinture industrielle), SFCMM (métallurgie), Adekma (manutention, transports), Harmonie Mutuelle (mutuelle santé), UIMM (syndicat patronal), Maison Berjac (commerce de gros), Atlantis (centre commercial), Les Pépinières du Val d’Erdre (pépiniériste), Dintec (moteurs) et Brémond (promotion immobilière).
Côté Héron Cendré, on trouve CEMétal (métallurgie), Guilberteau (menuiserie), Eugénie (boulangerie), Bélénos (serrurerie, plomberie), Thierry Immobilier (immobilier) et l’association Plein Centre. Oui, l’Arbre aux Hérons apaise la concurrence : les commerçants du centre-ville s’allient à Atlantis pour le promouvoir, même si le héron cendré des uns fait parent pauvre face au grand héron de l’autre…
Des mécènes pas pressés de tenir leurs promesses
Dix-sept mécènes, donc : il en manque vingt-trois pour arriver aux quarante censés avoir déjà dit oui. La plupart d’entre eux s’étaient déclarés depuis longtemps. Ouest France, par exemple, en recensait quinze voici trois ans. Et le Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons avait déjà engrangé 1,39 million d’euros de promesses de dons de la part d’entreprises mécènes en 2018. À ce jour, exception faite du Crédit Mutuel, le total des engagements des mécènes est compris entre 2.284.000 euros au maximum et 530.000 euros au minimum. La récolte 2019 ne paraît pas très abondante. On l’espère quand même supérieure aux frais de fonctionnement du Fonds (455.000 euros l’an dernier).
Certains mécènes annoncés naguère (Kéran, Idea, La Fraiseraie, Vinci…) sont absents de la liste publiée sur arbreauxherons.fr. Ils vont peut-être se réveiller et déverser des millions. Il serait temps ! Karine Daniel, ancienne députée socialiste et directrice du Fonds, tire des sonnettes depuis près de deux ans afin de financer un projet annoncé il y a quinze ans. Or pour le moment la somme totale réunie n’atteint probablement pas le quart de ce qu’il faudrait pour lancer la construction. La « confiance » revendiquée par la candidate aux municipales Johanna Rolland ne règne pas.
Sven Jelure
(1) Un rescrit peut être remis en cause si les conditions du demandeur changent. Nantes Métropole a décidé en octobre 2019, après la délivrance du rescrit donc, de modifier l’objet du Fonds de dotation pour l’étendre au financement du « Jardin extraordinaire ». La sécurité juridique ne règne pas plus que la confiance.
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Les « grands hérons » sont censés avoir versé au moins 50.000 euros. Mais d’après les comptes du Fonds de dotation publiés au Journal officiel, les trois entreprises qui ont payé en 2018, Adekma, Cryo Ouest et SFCMM n’ont versé que 15.000 euros chacune.
La situation financière du Fonds est peut-être encore moins bonne que vous ne le dites.
Sur le site, il est indiqué « 370 000€ récoltés grâce à la campagne Kickstarter ».
Comme pour la monnaie So’Nantes, c’est un bide monumental !