Végétaliser une promenade sans créer d’ombre : chapeau Nantes Métropole

Qui pourrait dire non à « une nouvelle promenade fraîche et végétalisée en centre-ville » ?
Cette nouvelle promenade nouvellement promise par Nantes Métropole comprend deux tronçons séparés : le cours Saint-André et le « parking Duchesse-Anne » (que le cadastre appelle officiellement « place de la Duchesse-Anne », mais passer d’un « parking » à une « promenade » fait tout de même plus frais et végétalisé). « Ces deux espaces aujourd’hui fortement minéralisés contribueront à réduire les îlots de chaleur urbains, capter le carbone et favoriser la biodiversité », assure Nantes Métropole.

Hélas, le projet relève du montage médiatique bien plus que de l’aménagement botanique. La promenade a beau être « fraîche et végétalisée », elle ne comptera pas un mètre carré d’ombrage supplémentaire.

La place de la Duchesse-Anne est bien moins minéralisée que Nantes Métropole ne le dit. Le parking est bordé d’une quinzaine d’arbres de belle dimension. On espère qu’il n’est pas question d’y toucher. En tout cas, on n’en plantera pas davantage, pour une raison très simple : le sous-sol du parking n’est pas disponible. Il est déjà occupé par le canal Saint-Félix. En fait de « végétalisation » on devra se contenter d’étaler une couche de terre pour y planter du gazon et de jolies petites fleurs. On pourrait même se passer de retirer le bitume existant…

Herbes folles et contreplaqué cours Saint-André

Pour le cours Saint-André, ce n’est guère différent. Sur les côtés, il compte déjà plus de quatre-vingts arbres plantés voici une quinzaine d’années – antérieurs à Johanna Rolland, donc. En guise de promenade ombragée, il font déjà l’affaire. Au milieu du cours, impossible de creuser : on buterait vite sur la dalle de béton du parking Cathédrale. Là encore, on ne fera pas mieux que de semer des parterres de fleurs sur un peu de terreau apporté. L’effet en faveur de la réduction des îlots de chaleur, etc., sera proche de zéro. Ajoutons que comme Nantes n’entretient plus ses trottoirs, les arbres existants sont déjà bordés à leur pied d’une végétation presque luxuriante…

 

Herbes folles cours Saint-André

(On se réjouit néanmoins de voir Nantes Métropole se soucier de l’aspect du cours Saint-André. Depuis des années, elle y tolère la présence d’une baraque en contreplaqué couverte d’affiches publicitaires à moins de 200 mètres de la cathédrale. Elle remplace l’élégante aubette en verre gravé construite en 2007 pour servir de sortie au parking. Probablement imposée par l’architecte des bâtiments de France, elle n’avait pas résisté à quelques coups de pare-choc. Heureusement, l’ABF semble n’avoir rien remarqué.)

Un gros budget pour détourner l’attention ?

Honnêtement, Nantes Métropole ne compte sa « promenade fraîche et végétalisée » que pour 8 100 m² de jardin nouveau, soit à peine plus de la moitié de la superficie totale du parking Duchesse-Anne et du cours Saint-André. Mais cette honnêteté topographique éclaire d’un jour différent le budget prévu : 2,3 millions d’euros. Pour aménager en pleine ville un hectare et demi de parc nouveau, ça se défendrait. Mais pour aménager 8 100 m² de plates-bandes (soit 284 euros du m²), cela semble prohibitif !

« D’ici l’été, le service Nature et jardins sélectionnera le paysagiste qui dessinera cette transformation », annonce Nantes Métropole. Serait-ce là l’ultima ratio de ces espaces verts Potemkine ? À moins que ce verdoyage* ne vise à détourner l’attention de la nouvelle place du Commerce, transformée par la fantaisie municipale en une promesse d’îlot de chaleur mahousse à la prochaine canicule ‑ et toujours pas inaugurée à ce jour…

Sven Jelure

* Verdoyage : manœuvre visant à donner l’illusion d’un souci écologique, équivalent du néologisme anglais greenwashing.

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