Nantes au Point mort

Johanna Rolland Rolland et son équipe pensent à une passerelle pour passer de l'hôpital public à l'hôpital privé

Irrémédiable jobardise du lecteur de magazine… On a beau savoir que l’important est dans le cahier publicitaire, on espère toujours de l’information. « Nantes, ce qui se mijote », titre Le Point cette semaine : ça met en appétit, non ? Hélas, ce plat mijoté tient plutôt du sandwich sous blister.

Quand un poids lourd de la presse hebdomadaire française d’information veut faire découvrir la sixième ville de France à ses lecteurs, qu’y lit-on ?

On y apprend que le projet de CHU est contesté : en voilà de l’actu ! Ou encore que la gare SNCF a fait l’objet d’un « lifting réussi » ; elle a ouvert au public le 20 novembre… L’actu devrait être plus brûlante avec les chantiers navals (de Saint-Nazaire, mais bon…) : pour eux c’est « l’heure de vérité », titre le magazine. Mais dès la deuxième phrase, on lit que le directeur général des chantiers de l’Atlantique « ne se préoccupe pas de la situation immédiate ». Pour l’heure exacte, repassez dans dix ans.

Faute de vraie actualité, Le Point s’est rabattu sur l’art de vivre avec une série de « coups de cœur pour bien déconfiner ». Il préconise de visiter (liste exhaustive et dans l’ordre) Little Atlantique Brewery, Bains d’Epsom, Barak, Meraki, Zoom, Ping Pong, Sepia, Coquerico, Flowers Jue, Delicatessaine et Billie’s. Inutile d’aller jusqu’en Seine-Saint-Denis pour trouver la Californie, et avec même la mer pas loin !

Alors, trouvera-t-on « ce qui se mijote » dans l’incontournable interview de Johanna Rolland ? La maire de Nantes nous informe que « l’enjeu du monde d’après sera de lutter contre les fractures sociales et territoriales ». Le monde d’après, Emmanuel Macron nous l’avait déjà faite, celle-là. D’après quoi ? Cela reste à préciser. Mais c’est du monde de maintenant qu’on voudrait avoir des nouvelles ! Heureusement, l’avenir se présente bien : Johanna Rolland assure au point qu’elle a « rejoint la dynamique plateforme Idées en commun d’Anne Hidalgo à travers l’équipe de France des maires pour réfléchie à des enjeux de fond ». Compte tenu de cette initiative audacieuse, comment Laurence Garnier ose-t-elle dire que « la ville de Nantes n’a rien compris » ?

Sven Jelure

Folle journée : alerte rouge sur les comptes de son fonds de dotation

En marge de La Folle journée, alerte rouge sur les comptes de son fonds de dotation

Comme si la situation de La Folle journée n’était pas déjà assez compliquée, on découvre à présent que son Fonds de dotation fait des siennes. Nantes Métropole aime les fonds de dotation ¹. Est-ce bien raisonnable ? Nantes Plus a déjà évoqué le Fonds à vocation culturelle, et bien sûr l’étrange Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons. Au tour du Fonds de dotation pour le développement culturel…

Ce fonds se rattache à une actualité assez dérangeante pour Nantes Métropole : il a été créé en vue de récolter des subsides pour La Folle journée. Il se présente sous le même logo que celle-ci. Un logo en forme de jeu de mikado : on retient son souffle de peur qu’une baguette bougée de travers par la cheftaine d’orchestre n’en fasse bouger d’autres.

Voici quelques semaines, on s’en souvient, la directrice générale de La Folle journée a dû s’éclipser fissa, soupçonnée d’acrobaties comptables. Quelques jours plus tard, Le Voyage à Nantes a été perquisitionné dans le cadre d’une enquête relative à la construction du Carrousel des fonds marins, suite à un rapport de la chambre régionale des comptes. Ce qui a rappelé que cette dernière avait aussi contesté fin 2019 les comptes de l’École des beaux-arts Nantes Saint-Nazaire (EBANSN). Et qu’un autre fleuron « culturel » de l’époque Ayrault, l’Institut d’études avancées (IEA) est en plein désordre depuis des mois. Le sujet est donc sensible.

L’affaire de La Folle journée a été découverte fin janvier à l’occasion de l’examen des comptes d’une association « proche des milieux municipaux », l’Espace Simone de Beauvoir. « Proche », le Fonds de dotation pour le développement culturel l’est encore plus puisqu’il a été créé par la ville de Nantes, qui en est administrateur. C’est dire si ses comptes vont être scrutés avec attention.

Des comptes résolument dans le rouge

Ce Fonds sollicite des mécènes pour financer des actions autour de la Folle journée. Il a par exemple acheté des gilets vibrants pour que des malentendants puissent « écouter » de la musique. Il ne devrait donc agir que s’il a l’argent pour cela. Trop simple, sans doute ! En fait, quatre années sur cinq, il dépense plus qu’il ne récolte. Et même, depuis quatre ou cinq ans, beaucoup plus. Il fonce dans le mur en klaxonnant.

Résumé des comptes du Fonds de dotation pour le développement culturel depuis dix ans

2010/2011 2011/2012 2012/2013 2013/2014 2014/2015 2015/2016 2016/2017 2017/2018 2018/2019 2019/2020
Produits 139491 166564 196500 158023 116760 108703 132228 128650 113553 92298
Charges 134261 169668 199082 161412 115611 129859 150082 201628 246558 168453
Résultat net 5230 – 3104 – 767 – 3389 1149 -21156 -17855 -66568 -133092 -76219
Dettes 93058 43939 34657 30658 103208 96012 117215 177745 291324 344394
Dispo. 29788 20407 11016 28411 50448 13604 64 15 23 30

Le Fonds n’a jamais été un collecteur d’argent bien efficace. Au lieu de d’améliorer ses recettes (produits), il régresse depuis son pic à près de 200 000 euros, atteint en 2012/2013. Et aujourd’hui l’annulation de la Folle journée n’incite pas les mécènes à sortir leur carnet de chèques.

Faute d’avoir su maîtriser ses dépenses (charges) ces dernières années, le Fonds semble aujourd’hui dans une situation quasi désespérée. Malgré un coup de frein sur les dépenses en 2019/2020, le trou a continué à s’aggraver. Au 30 juin dernier, date d’arrêté de ses comptes, il avait plus de 344 000 euros de dettes… et 30 euros en caisse !

Que va faire le préfet ?

S’il s’agissait d’une association banale, la situation pourrait se régler d’un coup d’éponge grâce à une subvention exceptionnelle. Tirer de la panade des amis en difficulté, Nantes Métropole sait faire. Mais un fonds de dotation n’a pas le droit de recevoir des subventions publiques, même indirectes !

Un fonds de dotation est aussi soumis à une surveillance stricte. Si son commissaire aux comptes constate que la continuité de l’activité est compromise, il doit demander au président du fonds de réunir le conseil d’administration, et si les mesures décidées par le conseil ne suffisent pas à rétablir la situation, il doit informer le préfet. Qui, en l’absence de solution, pourra demander la dissolution judiciaire du fonds.

Compromise, la situation du Fonds de dotation pour le développement culturel l’est manifestement. On voit mal quelles mesures pourraient rétablir la situation, et on imagine que le préfet est un peu embêté. L’idéal pour Johanna Rolland serait de trouver un mécène qui accepterait de signer à fonds perdus, juste pour ses beaux yeux, un chèque de plus de 300 000 euros.. Mission pas facile du tout, on le voit déjà avec le Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons, qui risque d’être une petite épine supplémentaire dans le pied de la nouvelle porte-parole du Parti socialiste pour l’élection présidentielle de 2022.

Sven Jelure

(1) Elle a créé le Fonds à vocation culturelle pour Nantes et Nantes Métropole, devenu Fonds métropolitain pour la culture Nantes et Nantes Métropole, le Fonds de dotation pour développement  culturel et le Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons, devenu Fonds de dotation de l’Arbre aux Hérons et du Jardin extraordinaire.

Jean Blaise, retraité clandestin ?

Bon anniversaire, Jean !

Décidément, c’est l’atonie complète du côté du  Voyage à Nantes. Comme nous disions le mois dernier, le problème n’est plus ce qu’il fait mais ce qu’il ne fait pas ! Il avait aujourd’hui une belle occasion de délivrer un signe de vie et ne l’a pas saisie.

Né le 17 avril 1951, Jean Blaise passe aujourd’hui le cap des 70 ans, et pas une festivité en vue ! Pas même un message public.

Pas un tweet de Nantes Métropole, de Nantes Tourisme ou ne serait-ce que de Johanna Rolland pour fêter l’événement. Le site du Voyage à Nantes « soutient et adresse tout son courage aux vignerons d’ici ou d’ailleurs et leurs équipes » mais n’a pas un mot pour son fondateur-directeur général.

Tout le monde à Nantes semble avoir oublié Jean Blaise. Dame, la lumière, ces temps-ci, est plutôt du côté du Havre. On est si peu de choses…

Bon anniversaire quand même, Jean Blaise !

Sven Jelure

Royal de Luxe, plus très royal, toujours opulent

Quels spectacle de Royal de luxe Johanna Rolland a-t-elle vu ?

Saint-Herblain a voté, ce vendredi 9 avril, une subvention à Royal de Luxe. Avec aussi Nantes et Nantes Métropole, la troupe devrait toucher plus de 420 000 euros en 2021, à quoi s’ajouteront probablement des subventions du département, de la région et de l’État, plus la mise à disposition de vastes locaux dans le Bas-Chantenay, pour une valeur proche de 100 000 euros par an. Royal de Luxe est un rentier à l’aise.

Parmi les innombrables troupes de théâtre de rue nées dans l’après-mai 1968, Royal de Luxe est l’une des réussites matérielles les plus éclatantes : après avoir tiré le diable par la queue comme les autres, la troupe obtient de la ville de Nantes les moyens de produire ses idées grandioses : La Véritable Histoire de France en 1990, Cargo 92 en 1992, Le Géant tombé du ciel en 1993. Sa renommée est au pinacle, de grandes villes étrangères achètent ses spectacles, Nantes la comble d’attentions. Et c’est le début de la décadence.

Les déclinaisons du Géant ne suffisent pas à camoufler le déclin de l’imagination. La Visite du Sultan des Indes sur son éléphant à voyager dans le temps, en 2005, un énorme succès à Nantes puis à Londres, Anvers et Calais fait exception. Mais ce spectacle entraîne le départ de François Delarozière, qui créera désormais ses machines de spectacle de son côté, toujours aux frais de la princesse nantaise. Depuis lors, Royal de Luxe n’est plus que l’ombre de lui-même. La troupe se partage entre des autopastiches de son Géant et des spectacles de patronage, en moins pieux. Le Mur tombé du ciel, en 2010, est une jolie réalisation grâce au talent de David Bartex mais procède d’une idée plutôt téléphonée (encore un truc tombé du ciel). Et puis, ça fait déjà plus de dix ans…

Demander à voir avant de payer

L’année 2020 est à mettre entre parenthèses, bien entendu. Mais qu’avait fait Royal de Luxe en 2019 ? La reprise de Miniatures, créé en 2017, un spectacle « tout petit-petit-petit-petit » selon Jean-Luc Courcoult lui-même, la tente de « Monsieur Bourgogne » accrochée au mur d’un immeuble de Bellevue, un lampadaire à nœud déjà vu deux ans plus tôt, une voiture transpercée par un arbre vite transformée en feu de joie par des amateurs d’art locaux, et une ou deux autres bricoles.

Après quasiment un an de relâche pour cause de covid-19, Royal de Luxe va-t-il revenir en 2021 plein d’idées nouvelles et surprenantes ? On annonce cinq nouvelles créations, dont un Retour de Monsieur Bourgogne qui n’avait pu avoir lieu l’an dernier. Royal de Luxe refuse d’en dire plus. Vu la faible productivité de la troupe ces dernières années, les collectivités locales feraient pourtant bien de demander à voir avant de payer.

Car les maigres réalisations de 2019 leur ont coûté cher. Cette année-là, Royal de Luxe a touché plus d’un million d’euros de subventions (1 009 142 euros exactement) et 96 717 euros de prestations en nature. Ses quelques représentations de Miniatures vendues à Anvers, Calais et Villeurbanne n’ont rapporté que 276 000 euros. Paradoxalement, les villes qui achètent les spectacles à l’unité les paient moins cher que Nantes qui les finance en gros. En 2017, chacun des 16 000 spectateurs de Miniatures avait coûté plus de 40 euros aux contribuables locaux.

La créativité peut-elle rebondir ?

Il y a d’ailleurs un côté grippe-sou chez Royal de Luxe. En 2019, la troupe a beaucoup économisé sur ses frais de personnel. Ils ont chuté de 1 162 519 euros (1,75 million avec les charges sociales) à 517 716 euros. Cela représente environ 34 500 euros brut par personne en équivalents temps plein (ETP). Mais il y a peu de temps plein et beaucoup d’intermittents chez Royal de Luxe. Au lieu lieu de 130 personnes en 2018, la troupe n’a rémunéré que 60 personnes en 2019.

Si bien que, malgré sa faible activité, Royal de Luxe a encore gagné pas mal d’argent en 2019. Au 31 décembre 2019, la troupe dormait sur un matelas de 488 792 euros de liquidités. Comme elle a continué à recevoir des subventions en 2020 sans dépenser grand chose en créations, ce pactole a dû continuer à s’arrondir. Pour les contribuables, il serait assez logique de décréter une année blanche : laisser Royal de Luxe se débrouiller par ses propres moyens et voir si ce respectable vestige de l’époque Ayrault reste capable d’imaginer de grandes idées.

Sven Jelure

Blaise storming : covidage à Nantes

Blaise storing... La perquisition dans la boite à idée du Voyage à Nantes n'a rien donné : elle était vide.

Faut-il tirer sur une ambulance ? Presse Océan nous apprend que le Voyage à Nantes vient d’être perquisitionné pour des faits remontant à la construction du Carrousel des mondes marins, inauguré en juillet 2012. Faut-il lui reprocher des faits d’aujourd’hui ? Mais qui parle de faits, d’abord ? Le problème d’aujourd’hui, c’est ce qu’il ne fait pas !

La nature a horreur du vide. La culture aussi. Graslin était vide ? On a trouvé à le remplir ! Oh ! ce n’est pas que la CGT ait eu à faire un gros effort d’imagination. Les occupations d’usines, elle sait faire, et en période de giboulées, il vaut mieux rester au chaud que de défiler à quelques-uns des Machines à la préfecture. La culture à Nantes n’est pas morte, elle pétitionne encore.

À part ça, pas grand-chose. Assurément, la culture, c’est plus dur en temps de covid-19. Mais ce qui frappe, c’est le manque quasi total d’initiatives de la part des supposés professionnels de l’imagination. Où est le Voyage à Nantes ? Confiné !

C’est mondialement officiel. Que fait le touriste étranger qui pourrait envisager de visiter Nantes ? Il consulte la page web en anglais de Nantes-Tourisme. Et les premières informations qui lui sont servies sont celles-ci :

Castle of the Dukes of Brittany closed until further notice
Museums closed until further notice
Machines closed until further notice

Ça donne envie ! Et si l’on remonte le fil de l’actualité touristico-culturelle depuis un an, c’est-à-dire depuis le début de l’épidémie, que trouve-t-on ? La principale réaction de Jean Blaise et de ses troupes a été de retarder d’un mois le Voyage à Nantes 2020, du 8 août au 27 septembre. Décision plus importante qu’elle n’en a l’air, expliquait alors Jean Blaise au Quotidien de l’art :  « La nouvelle date nous a accordé un sursis et nous a permis de nous fixer un but. Nous n’étions plus flottants. L’un des problèmes de cette pandémie est qu’elle nous a tous laissés en l’air : elle nous a donné la sensation que rien n’était déterminant.» La pandémie n’est pas finie.

Click and collect

Aujourd’hui, si l’on s’interroge sur les activités touristiques possibles à Nantes, voici la première proposition offerte : « La boutique de Nantes.Tourisme est ouverte » (sic). L’événement culturel le plus remarquable de ce début 2021 est la vente aux enchères du mobilier du Nid. Puis comme d’hab’ il y aura le VAN en été. D’accord, innover n’est sûrement pas facile aujourd’hui. Mais certains y arrivent. Exemple : le 12 décembre 2020, un concert-test a eu lieu à la Sala Apolo, haut-lieu de la vie nocturne à Barcelone. Il était organisé par le festival Primavera Sound et par une fondation médicale locale, avec l’aval de la région de Catalogne, officiellement pour étudier la transmission du virus parmi les 463 participants. (Résultat : zéro contamination.) On en a parlé dans le monde entier. L’imagination culturelle en temps de covid-19, c’est Barcelone, pas Nantes.

« Sans créativité, il n’y a pas d’image pour la ville » : ce dicton façon comme-disait-ma-grand-mère est de Jean Blaise, répondant à Éric Cabanas le 14 septembre dernier. C’est en substance la même rengaine depuis ses débuts au CRDC en 1987 : il faut de la créativité, et la créativité c’est Jean Blaise. On a pu croire un moment que c’était vrai, avec les Allumées, voici plus d’un quart de siècle. Mais depuis lors, la créativité à la nantaise (à la Blaise…) c’est surtout grandes proclamations et gros budgets.

L’avenir qu’on a devant soi, quand on se retourne, on l’a dans le dos

Voici la première phrase du dossier de presse annonçant la création du Voyage à Nantes, en janvier 2011 : « Le Voyage à Nantes est une structure née de la volonté politique de Nantes Métropole et de la Ville de franchir une nouvelle étape pour s’imposer dans le concert des villes européennes et mondiales, notamment en terme touristique : se positionner et s’affirmer en tant que destination ». Le moyen d’y arriver : semer des œuvres d’art à travers la ville (une idée d’une telle originalité qu’elle n’était venue à aucune cité depuis la Grèce antique).

Ça n’a pas très bien marché, le covid-19 a tout bousillé et l’on ignore s’il sera possible de relancer cette stratégie internationale dépassée. Pas grave, Jean Blaise fait demi-tour sur place et la rhabille en stratégie locale d’avenir, il l’a dit à Euradio le mois dernier « on avait déjà un coup d’avance avec cette idée que c’est la ville qui doit se montrer, qui doit intéresser les visiteurs et avec cette expérience ce savoir faire de l’art dans l’espace public ». Et d’ajouter : « donc on continue, bien entendu » ! Plus ça change, plus c’est la même chose (version populiste). Il faut que tout change pour que rien ne change (version culturelle).

Sven Jelure

Nantes et la culture en lutte

La lutte 100% jus de com. Sans se mettre en opposition avec le gouvernement. Quel beau travail politique. Tout en finesse !

La CGT fait le spectacle. Le rouge est mis. À défaut d’ouvrir le théâtre Graslin aux spectateurs, la Ville de Nantes y accueille la CGT. Non, il ne s’agit pas d’un congrès départemental du syndicat, juste une “occupation pacifique” d’une poignée d’intermittents mobilisés par la CGT Spectacle.

“Savoir que la Ville est derrière nous est extrêmement important…” Ce militant ne cache pas sa satisfaction de voir le directeur du théâtre et l’adjoint communiste à la Culture accompagner les manifestants. Comme l’écrit pudiquement Ouest-France (dans son édition du 11 mars), “l’accueil des maîtres des lieux est loin d’être hostile”. Il est vrai qu’Aymeric Seassau venait de s’en prendre publiquement au “pouvoir Macron”, accusé de sacrifier la culture. Qu’importe que le statut des intermittents, une spécificité française, reste protégé et que le ministère de la Culture continue de payer. “Macron, du pognon !”, le slogan n’est pas franchement nouveau mais il sonne bien.

Quand la Ville s‘aligne…
Et la culture dans tout ça ? Il n’en est pas vraiment question. Pourtant, c’est bien de cela dont il faudrait parler. “Vous êtes bienvenus chez nous…” Ce n’est pas au public qu’Alain Surrans, le directeur d’Angers Nantes Opéra, adressait ce message mais aux occupants du théâtre. Celles et ceux qui, depuis de longs mois, attendent la réouverture des salles de spectacle et de concert, des musées… sont priés de patienter. À aucun moment, la Ville de Nantes n’a véritablement réclamé la réouverture du Musée d’arts alors que la situation sanitaire n’a rien de dramatique au plan local. Le taux d’incidence du virus, comme le niveau de tension en réanimation, est, ici, très inférieur à la moyenne nationale.

On aurait pu imaginer, à l’occasion de la visite de Jean Castex, que le sujet de la réouverture des lieux de culture soit une priorité. Mais le Premier ministre n’était là que pour une opération de communication. Sa mission ? Donner l’image d’un homme de terrain qui n’a pas peur de se frotter à une ville de gauche. Opération de communication aussi pour Johanna Rolland, très honorée de recevoir “monsieur le Premier ministre” en tant que présidente de France Urbaine, un “machin” regroupant les villes et métropoles, créé en 2015, avec la bénédiction d’un certain… Manuel Valls.

Johanna Rolland a donc fait profil bas. D’autant qu’elle pouvait annoncer, le lendemain, que le gouvernement allait soutenir quelques projets nantais dont… l’Arbre aux hérons. Jean Castex lui avait lâché quelques pièces, elle n’allait pas s’en plaindre. Et qu’importe si le projet suscite toujours autant de débats au sein de la majorité municipale et en ville !

Cotillons et serpentins
Et la culture dans tout ça ? Quelle importance que l’Arbre aux hérons ne soit qu’une attraction de plus ! On en appellera à Jules Verne, à l’imaginaire et patati et patata… Pour le reste, il y a un moment déjà que Nantes ne donne plus le ton. Et que, sur ce plan, la Ville ne fait plus la “une” de la presse. D’autres ont leur opéra national, Nantes n’en a pas voulu. Et sur le plan du théâtre, comme de la danse, la création semble l’avoir désertée.

Il ne se passe rien ? Ce n’est pas grave. “Faites du bruit”, c’est le mot d’ordre de la municipalité. On improvise des animations dans les quartiers, dans l’indifférence quasi-générale, et on invite la CGT à occuper Graslin. Si les cotillons et les serpentins ne sont pas fournis, le syndicat est autorisé à accrocher ses ballons – rouges évidemment – dans le hall du théâtre et ça fait une belle (?) photo dans le journal. Tout cela est de l’ordre de la communication. Rien de plus.

Pour le reste, le roi ou plutôt la reine est nue. Les Verts avaient déjà rappelé à Johanna Rolland “la nature, c’est nous”. Et voilà que l’allié communiste monte au créneau de la culture en venant dire aux intermittents réunis à Graslin “je suis avec vous”. À se demander qui pilote la politique municipale.

En attendant, le public et les jeunes en mal de rendez-vous culturels et festifs sont priés de rester en salle d’attente. La CGT, elle, a le droit de monter sur scène et faire le spectacle. De quoi vous plaignez-vous ?

FC Nantes : c’est le Kita Comedy Club

Nous attendons le DVD de tous les sketchs. Vous allez rire !

“Confiez-lui la gestion du château des ducs de Bretagne, il finirait par raser le bâtiment…” C’est de Waldemar Kita dont il est question et c’est à un élu socialiste qu’on doit la formule. Et sans doute ne raserait-il pas gratis. Tant il est vrai que, malgré des résultats qui désespèrent les supporters, le FCN reste, pour son propriétaire, une bonne affaire. Si la maison jaune n’est plus qu’un champ de ruines, le coffre belge de la famille Kita, lui, se porte bien. Merci.

L’arrivée de Kita à Nantes était pourtant saluée, à l’époque, par la municipalité de Jean-Marc Ayrault. La presse spécialisée avait bien noté, en 2007, que le FC Lausanne avait dû déposer le bilan juste après le départ de Waldemar Kita de la direction du club suisse mais la Ville de Nantes était ravie d’en finir avec le groupe Dassault dont la gestion du FCN n’avait guère été brillante. Il était convenu d’applaudir. Pour mémoire, en 2005, Jean-Marc Ayrault avait déjà joué un rôle personnel dans le rachat par Ouest-France de Presse-Océan, appartenant au même groupe Dassault.

Des supporters à bout

Depuis 2007, les nerfs des supporters nantais ont été mis à rude épreuve. Avec huit titres de champion de France (entre 1965 et 2001) et trois coupes de France, le FCN possède toujours l’un des plus beaux palmarès qui soit. De grands noms faisaient alors vibrer le public de Saupin, puis de la Beaujoire. D’Henri Michel à Marcel Desailly, de Maxime Bossis à Christian Karembeu, de Didier Deschamps à Japhet N’Doram sans oublier les grands joueurs étrangers que le club faisait alors rêver : Hugo Bargas, Vahid Halilhodzic, Mario Yepes… mais le FCN, aujourd’hui, n’est plus que l’ombre de lui-même.

Pour les joueurs, comme pour les entraineurs,  le FC Nantes, devenu le FC Kita sur les banderoles des supporters, fait aujourd’hui les fonds de tiroir. Il est vrai qu’ils sont peu nombreux à se porter candidats. Avec le recrutement de Raymond Domenech, fin décembre, Waldemar Kita voyait en lui “l’homme de la situation” pour tenter de sauver une saison fort mal engagée. Depuis l’arrivée de Waldemar Kita à Nantes, dix-neuf entraîneurs se sont installés, souvent très brièvement, à la Jonelière. Le rythme s’accélère puisqu’avec l’arrivée d’Antoine Kombouaré, en lieu et place de Raymond Domenech, c’est le 4e entraineur de la saison…

Sous l’ère Kita, le FCN détient le titre de champion de France dans la valse des entraineurs. Qui se souvient de Christian Larièpe, d’Élie Baup, de Jean-Marc Furlan, de Landry Chauvin, de René Girard ? Ils ont en commun d’avoir été, pour Waldemar Kita, “l’homme de la situation” pendant quelques mois. Nul doute qu’il en ira de même avec Antoine Koumbouaré dont les états de service, là où il est passé, ne plaident pas vraiment pour lui.

Un magot en Belgique

C’est moins les résultats sportifs que les investigations de la Justice qui pourraient accélérer la chute de la maison Kita. Le propriétaire du club est en effet “empêtré dans une série d’acrobaties fiscales”, rappelait ainsi Médiacités Nantes, dans un article du 11 février. (https://www.mediacites.fr/enquete/nantes/2020/12/17/fc-nantes-waldemar-kita-rattrape-par-ses-acrobaties-fiscales/). Le site avait évalué à 14,8 millions d’euros le montant des sommes qui seraient dûes au titre de l’ISF. Bien que soupçonné de “fraude fiscale aggravée”, Waldemar Kita a néanmoins pu bénéficier d’un prêt garanti par l’État de… 11,4 millions d’euros à l’occasion  de la crise sanitaire et d’une rallonge, de la part de Ligue de football professionnel, de 7,7 millions en compensation des droits de retransmission télé non versés.

Dans un contexte de difficultés financières pour l’ensemble du football professionnel, le patron du FCN a pu faire remonter vers Flava Group, sa holding en Belgique, 2 millions d’euros de plus en juin dernier. À défaut de résultats sportifs, les affaires ne marchent pas si mal.

Et c’est le moment que choisit Ouest-France, pourtant très prudent en général, pour évoquer (dans son édition du 30 janvier dernier), la générosité de la Ville à l’égard du FC Nantes. Non seulement le club bénéficie de conditions de loyer, pour le stade de la Beaujoire et le centre de formation de la Jonelière, inférieures au prix du marché, mais la Ville lui verse une subvention de 200 000 euros/an au titre de “sa mission d’intérêt général”. Défense de rire. La Chambre régionale des comptes elle-même, prudente elle aussi, considérait les loyers réclamés au FCN comme “trop faibles”.

Le sketch du YelloPark

Décidément, à Nantes, les choses ne tournent plus très rond dans le monde du ballon rond. Qui se souvient encore du sketch du YelloPark ? Le projet, plus immobilier que sportif, avait été prudemment abandonné par Johanna Rolland à quelques mois des municipales. Malgré le soutien de Pascal Bolo, un adjoint de poids, et de Thierry Violland, un conseiller très proche de Johanna Rolland au sein de son cabinet, plus question de raser la Beaujoire. On se contentera simplement de “revoir le loyer à la hausse”.

Le 30 juin prochain en effet, la convention qui lie le FCN et à la Ville pour l’occupation du stade arrive à échéance. Pas au meilleur moment pour autant. En ligne de mire, la Coupe du monde de Rugby de 2023 et les J.O. de 2024. Pour être site d’accueil de ces deux manifestations, quelques travaux s’imposent. Montant annoncé de ce toilettage et mise aux normes : 8 millions d’euros. Tout le monde semble avoir oublié l’argument définitif de Pascal Bolo en faveur du YelloPark : “sans nouveau stade, pas d’épreuves des J.O. à Nantes”. Un pessimisme pour le moins prématuré puisque le Comité olympique a finalement retenu Nantes parmi les six ville hôtes des J.O.

Enquêter aujourd’hui sur le FC Nantes revient à plonger en eaux (très) troubles. Au-delà des démêlés fiscaux de Waldemar Kita, la justice s’intéresse en effet à un autre personnage de la “maison jaune”. Mogi Bayat – qui fait office de directeur sportif – est au cœur des transactions sportives du FCN. Pas un achat de joueur, pas une vente sans sa signature. L’homme a fait un mois de préventive en Belgique où il est inculpé de “blanchiment d’argent” et de “participation à une organisation criminelle”. On comprend que Waldemar Kita en ait fait son homme de confiance.

Le propriétaire du FCN brandit, en ce moment, la menace de délocaliser le centre de formation du FC Nantes. Ultime chantage sur l’air de “retenez-moi ou je fais un malheur” ? Chiche. Que Waldemar Kita installe donc son club entre Nantes et Ancenis s’il le souhaite : les tribunes du stade de la Davrays (*) devraient suffire à accueillir ses supporters.

Julien Craque

(*) le stade de la Davrays se situe à Ancenis, non loin de ma résidence de Saint-Florent-le-Vieil…

 

 

Petits poids, les Verts ?

Trop tard pour tuer Julie Laernoes ? C'est probablement ce que se dit Pascal Bolo.

Alors qu’elle fait de son mieux pour apparaître comme une personnalité nationale, dialoguant avec les ministres au nom de France urbaine dont elle est présidente, voilà qu’un certain nombre de dossiers rappellent Johanna Rolland à ses contraintes municipales. Sécurité, circulation, transports, transfert du CHU… la façade de la majorité municipale se fissure. “Les Verts sont dans le fruit…”, commente l’un de ses proches.

“J’en fais mon affaire…” Au lendemain des déclarations de Julie Laernoes sur le transfert du CHU, Johanna Rolland avait tempéré l’envie d’en découdre de quelques “porte-flingues” du PS. Ceux-ci avaient moyennement apprécié les concessions faites aux Verts entre les deux tours des municipales. Il est vrai que la tête de liste des Écologistes avait chèrement négocié son ralliement. Circulation en ville, aménagement de pistes cyclables, suppression du parking de la Petite Hollande, refus d’extension de la Cité des Congrès… Johanna Rolland avait dû revoir son programme.

 

Trop de couacs

Malgré ces quelques cailloux dans ses chaussures, la maire de Nantes continuait d’avancer. Quelques opérations de communication sur le “dialogue citoyen” permettaient de donner le change. On consultait à tout-va. Sans toutefois communiquer les résultats de ces échanges lorsque le “peuple” faisait part de son mécontentement comme on a pu le vérifier à propos des aménagements piéton-vélo. Malgré des conditions de circulation qui mettent à mal les nerfs des automobilistes, malgré les observations de la population concernée, ces aménagements seront en effet… pérennisés ! (Ouest-France du 2 février). Apparemment, le dialogue citoyen, la maire de Nantes en fait aussi son affaire.

Difficile de ne pas y voir une conséquence du poids des Verts au sein de la majorité municipale. Ces derniers temps, Johanna Rolland ne cache plus son agacement. À peine a-t-elle éteint le début de polémique née à la suite des propos de son adjoint à la Sécurité, Pascal Bolo, sur la libéralisation du cannabis, c’est Julie Laernoes qui rallume la chaudière à propos de l’Arbre aux hérons. Simple rappel, en l’occurrence, de l’opposition des Verts à “un projet qui n’est plus de saison”.

Si Johanna Rolland se serait bien passée de ces couacs, il en est une que ce petit jeu de poker menteur amuse. Margot Medkour, tête de liste de Nantes en commun, avait en effet prévu ce scénario et prévenu ses amis “écolos” : sur les grands projets, soit ils se rangeraient derrière Johanna Rolland et se renieraient, soit ils refuseraient de plier et la majorité municipale serait mal en point. Le printemps nantais sera-t-il chaud ? Allez savoir…

Entre quai de la Fosse et Île de Nantes, ça coince…

Un nouveau pont pont faire passer le tram qui dessert le futur CHU sur pilotis

Le pont des soupirs

Nouvel hôpital ? 2026. Doublement du pont Anne de Bretagne ? 2026. Johanna Rolland prépare activement son troisième mandat en reportant, à plus tard, ses “grands projets”. En attendant, le débat se poursuit et les oppositions semblent sortir de leur hibernation. Pour preuve, la pluie de critiques sur le futur (?) pont Anne de Bretagne.

La web série du mandat, comment faire passer le tramway pour desservir un CHU sur une île.

C’était un projet phare de la campagne municipale, au printemps dernier. Nantes allait construire un “pont promenade”, un “pont belvédère”, un “pont place” entre le quai de la Fosse et l’Île de Nantes. Un ouvrage dont la largeur (“entre 35 et 50 mètres”) reste à préciser mais dont l’utilité première est de faire passer une nouvelle ligne de tram appelée à desservir le futur (?) hôpital.

“Un vrai casse-tête”

La construction de ce nouveau pont est un “vrai casse-tête”, selon l’expression d’un architecte nantais. En effet, le Mémorial de l’abolition de l’esclavage interdit tout projet de construction en amont de l’actuel pont Anne de Bretagne. Par ailleurs, un tramway ne pouvant pas emprunter une voie à angle droit sauf à provoquer des nuisances sonores que connaissent bien les riverains du pont de la Motte Rouge et l’espace entre le quai de la Fosse et la Loire étant par ailleurs contraint, le projet de ligne nécessitera l’aménagement de deux courbes entre la Maison de la mer et l’actuel pont Anne de Bretagne.

Ce ne sont là que les premières contraintes techniques du futur ouvrage. On apprend ainsi (Ouest-France du 26 janvier) qu’il faudra également gommer la pente de 6% du pont actuel, “incompatible avec un accès pour les personnes à mobilité réduite”. On se dirige donc vers deux ponts, à proximité l’un de l’autre, mais à deux niveaux différents, ce qui est techniquement possible mais esthétiquement discutable. Sans compter que le niveau du second ouvrage réduira l’accès à la navigation en amont.

Le pont de trop ?

Une fois franchies ces premières difficultés, le projet n’en reste pas moins “très complexe”. Où faire passer en effet la future ligne de tram, côté sud ? L’espace y est en effet tout aussi contraint que quai de la Fosse. Quand on voit les difficultés actuelles de circulation sur le pont Anne de Bretagne, on imagine mal un système de circulation alternée entre voitures et tram… L’emprise au sol d’une ligne de tram est incompressible. Or, entre piétons, vélos, voitures… l’espace est déjà compté au niveau de la galerie des Machines et de Stéréolux. À la question, où débouchera le futur pont ?, pas de réponse à ce jour.

Un pont d’or

Comme pour le futur (?) CHU, difficile d’avoir un budget précis sur le coût final des travaux. Il est question de “50 millions hors taxes”. Sans qu‘on sache si les aménagements nécessaires, au nord et au sud du pont, sont compris dans cette enveloppe. “C’est deux fois plus que pour les ponts Senghor et Tabarly”, relève ainsi Julien Bainvel quand Laurence Garnier demande, elle, à Johanna Rolland d’appuyer “sur le bouton pause afin que le dialogue citoyen ne soit pas un dialogue de sourds”. Pour mémoire, la consultation “citoyenne” a valu, à Nantes métropole, de recevoir une volée de bois vert. https://dialoguecitoyen.metropole.nantes.fr/project/dnlt/collect/mon-avis-sur-le-projet

Le projet a permis aux oppositions de se réveiller. L’opposition classique, de droite et du centre, n’est pas seule à donner de la voix. La liste Nantes en commun se rappelle au souvenir de Johanna Rolland en rappelant au passage que les projets de nouvelles lignes de tram ne correspondent qu’à “un schéma du passé” n’offrant aucune desserte aux “communes périphériques oubliées”. Quant aux Verts de Julie Laernoes, coincés par leur contrat de solidarité municipale, ils suivent ces échanges “avec intérêt”, laissant à Johanna Rolland le soin de défendre son projet. On attendait au moins une réaction au nom des cyclistes qu’ils défendent : ces intersections de rails, le long du quai de la Fosse, croiseront en effet des pistes cyclables plutôt fréquentées. Attention, danger.

En tout état de cause, ce projet de pont n’est pas (tout à fait) pour demain. Le cahier des charges soumis aux cabinets d’archi n’a pas suscité de précipitation. Le choix du candidat retenu devrait intervenir, si tout va bien, “durant le second semestre de cette année”. Pour un démarrage des travaux, fin 2023. Nantes métropole se borne, pour l’instant, à annoncer trois ans de travaux. Autant dire que les automobilistes n’en ont pas terminé avec les embouteillages sur pont Anne de Bretagne…    

Dialogue citoyen : la démocratie à la nantaise

Consultons les citoyens ! Mais surtout, ne les écoutons pas !

Plus d’interventions de Johanna Rolland sans référence au dialogue citoyen. Promis, juré, ce serait la base de sa gouvernance municipale. Nouvelles lignes de tramway ou aménagement de la place de la Petite Hollande ? Pas de décisions sans consultation de la population. Une procédure qui a au moins l’avantage de… “laisser du temps au temps”. En attendant, cause toujours…

En juin dernier, on allait voir ce qu’on allait voir : réélue quasi-triomphalement (avec un taux d’abstention de 70 % !), Johanna Rolland confirmait le lancement d’une série de “grands projets” sur lesquels les “Nantaises-z-et-les-Nantais” auraient leur mot à dire. Ce qui ne pouvait pas mieux tomber car ils avaient quelques idées sur ces questions.

Drôle de tram

“Le projet de tram pose encore bien des questions”, titrait ainsi Ouest-France, dans son édition du 18 janvier. Non contents d’être consulté, voilà que le peuple osait s’interroger sur la pertinence de ces nouvelles lignes. On relevait même une “pluie d’avis critiques”, très majoritaires parmi les 582 contributions individuelles déposées au 18 janvier alors que la consultation s’achève le 24. Difficile de ne pas remarquer que ces ‘nouvelles lignes” ne sont guère que quelques tronçons ajoutés au réseau existant et que, globalement, c’est l’hyper-centre de Nantes qui va bénéficier de ces nouveaux équipements.

Priorité des Verts quand ils étaient dans l’opposition, la ligne circulaire pour éviter de devoir passer par le centre et desservir les communes de la première couronne est remise… à plus tard. Par contre, déjà desservie par le tram-train, La Chapelle-sur-Erdre(dont le maire, Fabrice Roussel, est socialiste et vice-président de Nantes Métropole) aura bien son bout de ligne de tramway. Carquefou, Sainte-Luce, Thouaré attendront.

Même grogne dans le sud-Loire. Mais si le maire de Saint-Sébastien-sur-Loire, Laurent Turquois, peut avoir quelques idées, son étiquette de centre-droit ne plaide sans doute pas en sa faveur.  Même si le Groupement d’analyses et d’études de Loire-Atlantique a lui aussi souligné que l’ensemble des nouveautés annoncées n’allait finalement concerner qu’une commune de plus.

Hollande le retour

Le réaménagement de la place de la Petite Hollande a fait, lui aussi, l’objet d’une consultation populaire.  Malgré une vaste campagne de promotion des services communication de la Ville et de la Métropole, l’intérêt pour ce “grand projet” reste limité. Seule, la question de la suppression du parking “peu sympathique” (sic), selon les termes de Stéphanie Lambert (Ouest-France du 18 janvier) fait toujours débat. Peu sympathique, peut-être, mais sans doute utile si on en juge par sa fréquentation.

La consultation citoyenne a ses limites : certes Johanna Rolland avait promis un parking souterrain mais les Verts ont finalement obtenu gain de cause. Pas de parking. Pas de construction, non plus, sur le square Daviais.  Dans le prolongement de l’îlot Kervégan, le projet initial prévoyait l’aménagement d’un belvédère susceptible d’offrir une perspective sur le fleuve, jusqu’à la butte Sainte-Anne. On se contentera de réaménager le square, en supprimant les arbres “trop hauts” (sic) et en en plantant d’autres “favorables à la biodiversité” ? Défense de rire.

On est également prié de garder son sérieux lorsqu’on évoque un “volume des espaces triplé”. Parle-t-on de la surface au sol ? D’une construction souterraine ? Ou aérienne ? Mystère. Quant à la surface qui devait initialement être aménagée en parcours sportif la voilà réduite à “une grande pelouse”, laquelle sera sans doute plus “sympathique” que le parking.

CHU ? Chu…t !

Et pour le projet du futur hôpital ? Là, curieusement, pas d’appel au dialogue citoyen. Le sujet est sans doute trop sérieux pour qu’on demande son avis aux habitants concernés. Pas question donc de remettre en question ce transfert. Comme si Johanna Rolland tenait absolument à inaugurer le premier hôpital en France construit sur pilotis (lire par ailleurs Un CHU sur pilotis : une première à Nantes).

Instructifs pourtant, les propos de l’architecte Michel Cantal-Dupart sur le sujet. Dès juin 2016, dans un courrier à Bernard Le Mével, il relevait les erreurs d’analyse qui avaient conduit au choix de l’Île de Nantes pour le futur CHU. Certes, Laurence Garnier, au nom de ce qu’il reste d’opposition, a bien tenté de rallumer la mèche mais la cause semble entendue : ce projet-là se fera “quoi qu’il en coûte”, comme on dit désormais. Pas question d’abandonner ce projet phare, Et il le faut sinon le bilan du second municipe, avec le report des autres grands chantiers, risquerait d’être bien maigre.

Mais le fameux dialogue citoyen a tout de même un avantage de poids : il permet aux élus de justifier à l’avance tout retard dans les travaux. C’est ainsi que ceux de la place de la Petite Hollande ne commenceront finalement (et si tout va bien) qu’en 2024. On annonce même la fin de l’ensemble du projet pour… 2028/2029. Autant dire que Johanna Rolland prépare déjà son programme pour un troisième mandat !