Nantes tech : plus de mousse !

Nantes, nouvelle Capitale French Tech. Voilà qui méritait bien l’un de ces communiqués ronflants dont Nantes Métropole s’est fait une spécialité. Plus la réalité est “gazeuse”, plus il convient de faire de la mousse. Car, comme bien souvent, au poids des mots répond le choc d’une réalité nettement moins glorieuse.

Premier “détail” minimisé par le service info métropolitain, Nantes n’est que l’une des 13 capitales french tech de l’hexagone. On y retrouve le Grand Paris, Aix-Marseille, Lille, Bordeaux, Toulouse, Lyon-Saint-Étienne et même… Brest. Voilà donc la crème de la french tech soutenue par le secrétariat d’État au numérique qui ne ménage pas ses efforts, via la mission french tech créée à cet effet, puisque sont aussi labellisés quelque 48 communautés french tech et 48 communautés french tech à l’international. Au total, ce sont donc 109 communautés qui ont été labellisés par la Mission french tech.

Relancer le « machin »

La french tech est devenue l’un de ces “machins” dont on raffole en France. À l’État, et donc aux contribuables, plutôt qu’aux entreprises et au secteur privé, de préparer et de financer des lendemains qui chantent. Pas si simple si l’on en croit La Tribune (du 3 avril dernier) qui souligne la nécessité de “relancer” la machine. Cette labellisation vise, nous dit-on, à “faire le ménage dans les initiatives locales… dont le fonctionnement est souvent rendu difficile par les luttes de pouvoir entre les différents acteurs”. Une analyse qui semble faire écho à la longue enquête que Médiacités Nantes a consacré à ce sujet.

Dans cette enquête, en trois volets et fort bien documentée, Médiacités Nantes a pu souligner les (très) faibles retombées économiques réelles de la “start-up nantaise”. Et mettre en lumière les relations entretenues par cette “bande de copains” startupers avec la municipalité. Un article de Presse-Océan, dès octobre 2017, parlait déjà de “gros sous et copinage”. Dès qu’on parle Nantes-tech, l’adjoint au numérique, Francky Trichet, est en première ligne. Avec en charge l’animation et le contrôle du mouvement. Le bouillonnement, c’est bien, mais inutile qu’il déborde le cadre que la ville lui a fixé.

Kat Borlongan, directrice de la Mission french tech, créée par Fleur Pellerin en 2013, a publiquement regretté que “certains boards de French Tech ont été menés par des gens qui n’étaient pas entrepreneurs et n’avaient que ça à faire”. Suivez son regard. D’où le souhait formulé de soutenir désormais “des projets concrets avec des résultats attendus”. Son souhait ? qu’au moins 75% des membres des “boards” de ces “capitales french tech” soient des entrepreneurs ou des dirigeants de startups. Ce qui, aujourd’hui, est loin d’être le cas.

Accessible en cliquant sur l’éléphant. Et là, on fait quoi ? On éclate de rire ?

Résultats décevants

Ce serait (presque) négligeable, si les résultats étaient au rendez-vous. Or, côté résultats, justement, l’enquête de Médiacités révèle, sans surprise, les maigres retombées enregistrées à ce jour en terme d’activité économique et d’emplois. Par ailleurs, la pérennité des entreprises est loin d’être assurée. Qu’importe cette réalité : Nantes Métropole “estime” que “5 700 emplois ont été créés”. On appréciera la prudence puisqu’on ne sait pas d’où vient cette “estimation”, ni de quand elle date.

Nantes Métropole qui ne manque pas de souligner son soutien à l’innovation a souhaité mettre en place “son” quartier de la création. La création labellisée, ce sera là et nulle part ailleurs ! Ce quartier aura son “bâtiment totem”, la halle 6 des anciens ateliers Alsthom. Une halle appelée à devenir “le centre névralgique pour l’animation et le rassemblement de la communauté”. Fermez le ban.

Appelée à promouvoir la “nouvelle capitale french tech”, la presse locale s’est sagement empressée de relativiser. C’est ainsi que Ouest-France, dans son numéro du 4 avril rappelle que “l’association reçoit des subventions qui servent à ouvrir des locaux où ces entrepreneurs organisent des pince-fesses…” Nantes reste une fête et c’est là l’essentiel. Le journal reconnaît épargner à ses lecteurs “le jargon mystérieux utilisé par la Métropole pour célébrer ce type d’événements”. Ce dont chacun lui est reconnaissant. Encore que, pour le plaisir, on peut jeter un œil sur le site (nantestech.com) pour en être convaincu : Nantes, c’est plus que jamais Nantesplus ! Le contribuable, lui, aimerait juste un peu “plus” de résultats concrets. À défaut, Francky Trichet et ses startupers pourraient sortir de l’entre-soi et offrir aux contribuables nantais une soirée… mousse. Soirée évidemment sponsorisée par le service com’ de Nantes Métropole, devenu maître en la matière.

Victor Hublot

Jean Blaise, intermittent du voyage

La Cantine du Voyage, que TripAdvisor classe 627e sur 1 233 restaurants à Nantes, a rouvert ce jeudi. L’été commence tôt cette année.

À cette occasion, 20 Minutes titre : « Le Voyage à Nantes, qui rouvre sa Cantine dès jeudi, veut capter les touristes toute l’année ». Julie Urbach a recueilli les commentaires de Jean Blaise, patron du tourisme à Nantes. « On pense de plus en plus à ce que l’on appelle le Voyage permanent », assure-t-il. Autrement dit, faire venir les touristes toute l’année et pas seulement en été.

Quel est le nom de famille d’Aloïs, déjà ? Il suffit de consulter le site web du Voyage à Nantes, dirigé par Jean Blaise pour constater que, « depuis 2012 », il « s’attache à promouvoir toute l’année un parcours pérenne d’une quarantaine d’étapes ». C’est un leitmotiv de ses rapports annuels d’activité, comme en 2014 par exemple : « toute l’année, Le Voyage à Nantes travaille pour le développement du tourisme à Nantes ». Présentant une appli touristique nantaise, Ouest France écrivait ceci le 12 juillet 2013 : « C’est aussi une manière de bien faire comprendre que le Voyage à Nantes, c’est toute l’année, indique Jean Blaise, directeur du VAN ». Et c’est d’ailleurs ce qu’on attend de tout office du tourisme qui se respecte…

Au Havre, l’été dure toute l’année

Les biennales Estuaire (2007-2009-2012), dirigées par le même Jean Blaise, visaient elles aussi à créer une attraction touristique permanente. Là aussi, interrogeons le site web officiel qui présente « une collection d’œuvres d’art contemporain à Nantes, Saint-Nazaire et sur les rives de l’estuaire de la Loire, à découvrir toute l’année ». En 2013, présentant une vidéo sur Estuaire, Jean Blaise tenait à « rappeler qu’Estuaire, comme le Voyage à Nantes, a donné naissance à des monuments exceptionnels qu’il est possible de découvrir toute l’année ».

Penser « de plus en plus » en 2019 à un tourisme annualisé qu’on était censé promouvoir dès 2012, est-ce un aveu d’échec pour les sept années précédentes ? Ou est-ce plutôt que Jean Blaise ne sait plus très bien où il habite ? À côté du Voyage à Nantes, il dirige Un été au Havre. Et il n’en peut plus, car pour préparer cette manifestation estivale, explique-t-il tout réjoui face caméra« il faut d’abord commencer à travailler en automne, en hiver, au printemps et ensuite l’été au Havre ». Toute l’année, quoi. On peut comprendre qu’il ait un peu perdu de vue sa responsabilité nantaise, tout en continuant à percevoir son salaire toute l’année, bien entendu.

Sven Jelure

L’Arbre aux Hérons encore plus ouvert au public ?

Où en est le projet d’Arbres aux Hérons ? Quelques documents publiés épisodiquement permettent de s’en faire une idée. Parmi eux figure par exemple un « Dossier de présentation des premières hypothèses d’exploitation et de sécurité », à en-tête de La Machine : du lourd et du sérieux, donc.

En voici deux phrases. Trouverez-vous le détail qui cloche ?

« Les problématiques concernant l’accessibilité sont au centre de nos métiers, aussi bien pour la construction d’installations recevant du public (ou de manèges forains) que pour leur exploitation. Pour les deux premières tranches des Machines de l’île, les auteurs et les constructeurs ont imaginé de nombreuses solutions pour rendre aussi bien le Grand Eléphant, le Carrousel des Mondes Marins et la Galerie des Machines accessibles à tous les publics. »

Si vous donnez votre langue au chat, voici ce qui cloche : c’est l’expression « installations recevant du public ». La législation française distingue les « établissements recevant du public » (ERP) et les « installations ouvertes au public » (IOP). Les formalités et contrôles de sécurité pesant sur les ERP sont plus lourds que ceux pesant sur les IOP.

La formule bâtarde (IRP…) qui figure dans le document de La Machine est donc ambiguë. À dessein ? « On ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment », assurait le cardinal de Retz. Cependant, un peu plus bas dans son document, La Machine affirme explicitement que le « cadre réglementaire » applicable à toutes les parties publiques de l’Arbre aux Hérons serait celui d’une « installation ouverte au public (IOP) ».

Ce qui est étrange. Le Carrousel des Mondes Marins, expressément cité plus haut, n’est pas une IOP mais un ERP ; il est prévu pour 300 visiteurs alors que l’Arbre pourrait en recevoir 550. Un débit de boisson est explicitement un ERP de type N (la cour d’appel de Nantes a eu à se prononcer sur le sujet voici quelques années) ; l’Arbre aux Hérons devrait en compter deux. Il comportera aussi une boutique (ERP de type M) et une salle de vidéo (ERP de type L).

Alors, présenter l’Arbre aux Hérons comme un IOP plutôt qu’un ERP serait-il une simple étourderie ? Se planter sur le sujet ferait plutôt désordre pour Nantes Métropole, qui serait propriétaire de l’Arbre. Johanna Rolland ferait bien d’éclaircir la question sans tarder.

Sven Jelure

Les start-ups nantaises entre bonne fée Johanna et marâtre nature

On aimerait croire les belles histoires. La société nantaise Bescent est rachetée par Lampe Berger, nous apprend Presse Océan ce 14 mars. Bescent, c’est le créateur en 2015 du « réveil sensoriel » Sensorwake, un réveil-matin qui diffuse une odeur suave au lieu de déclencher une sonnerie. Idée aimable. Succès médiatique, d’autant plus que l’un des deux fondateurs de la société, Guillaume Rolland, n’avait alors que 18 ans. Avec Lampe Berger, Bescent « passe la vitesse supérieure », assure Presse Océan.

En fait de vitesse supérieure, Bescent, déficitaire, a été mis en règlement judiciaire début février. Son cofondateur, Ivan Skybyk, s’en était déjà dégagé l’été dernier. Sa vente à Lampe Berger n’est pas une promotion, c’est une solution élégante pour quitter la scène en limitant les dégâts.

L’important est d’entreprendre, échouer n’est pas si grave. Sauf que Bescent n’aurait jamais dû échouer. C’était l’une des sept start-ups sélectionnées en 2015, parmi soixante-deux candidatures, par la Creative Factory. Celle-ci n’est autre que le cluster des industries créatives et culturelles de l’île de Nantes, géré par la Samoa, une SPL dont le capital appartient majoritairement à Nantes Métropole. La Samoa est présidée par Johanna Rolland.

Bescent aux enfers ?

La Creative Factory, dont on se demande pourquoi elle a justement choisi un nom si peu créatif, se présente elle-même comme un « opérateur économique de développement des filières des industries culturelles et créatives ». Elle « dispose d’une offre de services et d’un dispositif d’accompagnement qui favorisent l’implantation de votre entreprise, la création d’emplois et la pérennité économique de vos projets ». Elle prend chaque année sous son aile quelques start-ups afin de les accompagner vers le succès. Et l’argent abonde : depuis six ans, les entreprises soutenues par Creative Factory ont levé 13,9 millions d’euros.

Avec un tel tuteur, Bescent n’aurait jamais du échouer mais a échoué quand même. La Creative Factory a-t-elle mieux réussi l’implantation, la création d’emploi et la pérennité avec les six autres start-ups de sa promotion 2015 ?

  • Baludik, éditeur d’une appli mobile pour les acteurs du tourisme, ne va pas trop fort. Ses actionnaires ont décidé en 2018 de poursuivre l’activité malgré une perte supérieure à la moitié du capital social. Plus récemment, ils sont convenus de remettre de l’argent au pot pour reconstituer l’actif net.
  • Mobidys, alias Majenat SAS, éditeur de livres numériques pour les publics atteints de troubles de l’apprentissage de la lecture, est toujours là, et fonctionne réellement. La société dépose même ses comptes annuels au greffe du tribunal de commerce, obligation légale dont beaucoup de start-ups se dispensent. Mais elle les assortit d’une déclaration de confidentialité, ce qui signifie souvent qu’ils ne sont pas très bons. Et sa présidente vient de créer une autre entreprise : va-t-elle prendre la tangente ?
  • Music You Share, créateur d’un réseau social musical, semble avoir disparu en rase campagne. Son site web mysit.com est introuvable, son compte Twitter n’est plus alimenté depuis trois ans
  • Myteeshirtletter, alias Play Art Atelier, à Longeville-sur-Mer, créateur de t-shirts personnalisés vendus sur abonnement, a été mis en liquidation judiciaire par jugement du 4 avril 2018.
  • OPDesign, créateur de meubles en béton, a été liquidé et radié du RCS au printemps 2018. L’adresse de son site web opdesign.com est à vendre, pour ceux que cela intéresserait.
  • Termites Factory, producteur de film et de programmes pour la télévision, a été mis en liquidation judiciaire simplifiée par jugement du 10 octobre 2018.

Sven Jelure

Nantes toujours plus féministe en paroles

Le 8 mars est une journée importante pour Madame Monsieur le maire de Nantes

Johanna Rolland tient à ce qu’on l’appelle Madame le maire. N’empêche, à l’occasion de la Journée de la femme, le 8 mars, elle s’est fendue d’une tribune dans Le Monde et d’un discours à l’espace Simone de Beauvoir (auquel la ville de Nantes verse 107.000 euros de subvention annuelle) où s’ouvrait le festival « Portée de femme ». « Le monde culturel et le milieu musical, tout comme la société dans son ensemble, ne sont pas épargnés par les inégalités et discriminations de genre », a-t-elle déploré.

Heureusement que Nantes, histoire de redresser la balance, pratique une stricte égalité « de genre » dans le domaine culturel. La mission incombe à un homme, David Martineau, adjoint à la culture, qui n’occupe que le 11ème rang dans la hiérarchie du conseil municipal.

Quand on parle culture à Nantes, à quelles institutions songe-t-on ? Par l’importance des budgets, d’abord au Voyage à Nantes, dirigé par un homme, Jean Blaise. Deux gros morceaux culturels ou réputés tels sont placés sous sa responsabilité : le Château des ducs de Bretagne et les Machines de l’île, sous la houlette de Bertrand Guillet et Pierre Orefice. Les Machines de l’île se fournissent essentiellement auprès de La Machine, de François Delarozière. Autre gros morceau budgétaire, Angers Nantes Opéra a été confié à Alain Surrans.

Les femmes au musée

Du côté des grandes manifestations culturelles, Nantes met systématiquement en valeur La Folle Journée, fondée par René Martin. Elle est hébergée par La Cité, que gouverne Denis Caille, et Le Lieu unique, dirigé par Patrick Gyger. Loin derrière vient le Festival des Trois continents créé par les frères Jalladeau et aujourd’hui piloté par Jérôme Baron. Quant à Royal de Luxe, qu’on s’entête à dire culturel, Jean-Luc Courcoult y tient toujours la barre. Également dans l’orbite d’une municipalité qui leur confie de gros moyens, Stéréolux, Trempolino et Pick Up Production sont dirigés respectivement par Éric Boistard, Olivier Tura et Nicolas Reverdito.

Pas une femme, donc, pour prouver le sentiment égalitaire de Nantes ? Si quand même : Sophie Levy dirige le Musée d’arts de Nantes. Elle succède même à deux femmes. Qui n’ont pas toujours eu la vie facile : difficile d’échapper à la discrimination de genre. Quant au musée Jules Verne, il a pour patronne Agnès Marcetteau.

En queue de conseil

Du côté de la « société dans son ensemble », le féminisme militant de Johanna Rolland se manifeste clairement dans la hiérarchie du conseil municipal de Nantes et du conseil de Nantes Métropole. Parmi les dix premiers adjoints de Nantes, on compte quand même une femme, Pascale Chiron. Côté pecking order de Nantes Métropole, Michèle Gressus compte au sixième rang des vice-présidents, Claudine Chevallereau au onzième. Dame ! Tout le monde ne peut pas être premier comme Fabrice Roussel, deuxième comme Bertrand Affilé, troisième comme Pascal Bolo, quatrième comme Gérard Allard, cinquième comme Michel Lucas… Les huit femmes, contre douze hommes, de cette armée mexicaine, sont donc plutôt vouées aux derniers rangs.

Tandis que Johanna Rolland mettait la dernière touche à ses déclarations féministes se tenait à la Sorbonne, le 6 mars, un colloque le thème « Féminisme et communication ». Il était consacré au women washing, la com’ à prétentions féministes plaquée sur une réalité qui l’est beaucoup moins.

Sven Jelure

N.B. Article rédigé sur une idée d’E.L. Merci à lui.

Transfert du CHU : pronostic vital réservé ?

De l’audace, toujours de l’audace… Et à Nantes, plus qu’ailleurs, qui peut le “plus” peut le moins. C’est si vrai qu’après les abandons de Notre-Dame-des-Landes et du YelloPark (deux pas de côté comme dirait Jean Blaise), certains spéculent déjà sur le nouveau chantier du futur (?) CHU. Jamais deux sans trois ?

La Métropole se félicite déjà de présenter “le plus gros projet d’établissement public de santé de France”. À l’état de projet, on en est déjà au milliard d’euros. L’expérience de ce type de chantier peut laisser craindre, au bout des comptes, un dépassement de 25%. Ouest-France nous précise le poids du bébé : 30kg de dossiers divers. Un chiffre qui paraît juste un peu léger lorsqu’on apprend par ailleurs qu’une cinquantaine de personnes travaillent “à temps plein” sur le dossier depuis deux ans.

 

Avant l’enquête, les travaux continuent

 

Si le cœur vous en dit, vous pourrez consulter cette masse de documents à partir du 25 mars puisque c’est à cette date que sera ouverte l’enquête publique. Pas besoin d’en attendre les résultats pour commencer les travaux : sondages et terrassements vont bon train depuis plus d’un an, le long de la Loire, sur le site du futur CHU. C’est dire l’importance de la future enquête… À celles et ceux qui ont mis en avant accessibilité, crainte d’inondations, survol d’avions se dirigeant vers Nantes Atlantique, on se bornera à répéter que tout est parfaitement maîtrisé.

 

Il est ainsi rappelé que le niveau zéro du futur hôpital resterait, en cas de crue millénaire, “40 cm au-dessus de l’eau”. A-t-on pris en compte le réchauffement climatique, la fonte des glaciers et sa répercussion sur le niveau des eaux ? Ou bien a-t-on étudié les crues du siècle dernier qui avaient provoqué l’évacuation de certaines maisons de Trentemoult ? Allez savoir… Toujours est-il qu’on indique qu’en cas de crue “les deux ponts sur la Loire demeureraient hors d’eau” et que “l’hôpital resterait accessible par hélicoptère”. Défense de rire. Si c’est la directrice adjointe de l’hôpital qui le dit, pourquoi en douter ?

 

Les autres points noirs concernant le futur équipement sont balayés avec la même tranquillité. Mieux, ceux-là même qui plaidaient hier le nécessaire transfert de l’aéroport en raison du survol de l’hôpital n’y trouvent plus rien à redire aujourd’hui. On aurait mal entendu. Le futur hôpital serait juste transféré un peu plus proche et un peu plus dans l’axe de la piste de décollage/atterrissage de Nantes-Atlantique mais qu’importe. Quant à l’accessibilité, Nantes Métropole annonce non pas une mais deux lignes de tramway dans un futur qui reste à déterminer. Si leur réalisation prend autant de temps que la desserte de l’aéroport, il faudra se montrer patient. En même temps, les patients ne viennent pas forcément à l’hôpital en empruntant les transports en commun !

 

Voilà en tout cas un dossier dont les Nantais n’ont pas fini d’entendre parler. Un (ancien) panneau de signalisation devrait faire son retour devant les bien nommées salles de consultation de l’enquête publique : Hôpital Silence. Sans doute est-il encore tôt pour établir le diagnostic final mais une chose est sûre, l’opération s’annonce délicate.

Un nouveau tramway plus, plus, plus…

Tramway...

Plus de doute, les prochaines municipales sont sur les rails. Pour preuve, cette communication à tout-va sur cette ville “pionnière” que les Nantais ont la chance d’habiter. Après la présentation de la navette “plus” autonome et “plus” innovante qui a valu cette photo improbable (et réjouissante !) d’un ministre de l’Écologie entouré de l’élite nantaise, sauf Madame la Maire, voilà donc le tramway « nouvelle génération » attendu pour 2022 !

2022 ? Au lendemain des prochaines municipales. Le timing est parfait à l’image de la communication sur ces futures rames à l’esthétique “sobre et épuré”, “plus lumineuses et transparentes” et on vous passe les autres “plus” du dossier de presse, retranscrit mot pour mot, ou presque, par une presse enthousiaste. Ce futur tramway ne peut être que “plus” puisqu’un panel (si, si…) de Nantais a été associé au projet.

La réalité, comme pour la navette “plus” autonome, écologique et innovante que celle qui circulent déjà presque partout, est moins brillante que le tableau qu’on nous en brosse. Dans le sens du poil bien entendu. La Semitan va ainsi se débarrasser de ces vieilles rames, grinçantes et fatiguées pour un matériel nous offrant « un saut sur les plans technologiques, de confort, d’esthétique et de capacité ». Pensez donc, on nous annonce pour 2022/2025 une augmentation de capacité de… 20 % !

Les rames, déjà surchargées en tout début de matinée comme en fin d’après-midi, offriront donc 20 % de places supplémentaires. Comme si, depuis le lancement du tramway à Nantes, le trafic n’avait augmenté que de 20 % ou comme si on ne prévoyait, pour les 20 ans qui viennent, qu’une augmentation de 20 %. Plus de visibilité pour les futurs passagers du tramway, oui bien sûr, mais ce qu’on attend de la présidente de Nantes Métropole et son vice-président aux transports, maire de Saint-Herblain, c’est un peu plus de vision. Épargnons le Président de la Sémitan, Pascal Bolo, empêtré dans le dossier de l’ex-futur stade de son “ami” Kita.

Drôle de tram…

Mme la Maire n’en continue pas moins d’affirmer que Nantes est, comme en tout domaine, une ville “pionnière”. Hélas, les chiffres ne lui donnent pas vraiment raison : Strasbourg, mais aussi Bordeaux ou Lyon n’ont pas attendu Nantes pour développer leurs réseaux de transports en commun. Et pour transporter, chaque jour, un nombre de passagers sensiblement supérieur.

Comme le dit le journal “encore un peu de patience avant de rouler dans ces nouvelles rames”. Elles seront, c’est sûr, aussi bondées, de 2022 à 2040, qu’elles le sont aujourd’hui. Nantes plus propose donc à la municipalité de retenir sans attendre Patrick Sébastien pour l’inauguration (en 2022, il semble que son agenda sera allégé). Histoire de reprendre avec lui tous en chœur, “ah ce qu’on est serré au fond de cette rame…”

Toujours plus de tests pour la navette

Trois ans plus tard

“Les transports de demain s’inventent à Nantes Métropole…” Voilà ce qu’annonce un communiqué très officiel de l’agglomération nantaise. De quoi s’agit-il ? D’une nouvelle phase de tests d’une navette autonome. De la métropole lancée dans une course au “plus”, ça mérite bien un roulement de tambour. Sauf que la réalité est un peu moins flatteuse : des navettes autonomes circulent déjà, depuis quelques années, en France. Et un peu partout dans le monde.

À en croire pourtant le texte triomphant de Nantes-Métropole, les tests de ce “nouveau mode de transport intelligent et respectueux de l’environnement” confirmeraient que Nantes est bien cette “ville pionnière de l’innovation et de la transition énergétique”. Une ville forcément “innovante et collaborative” (sic) appelée à servir d’exemple aux autres métropoles.

Celles et ceux qui n’ont pas tout à fait perdu la mémoire se souviennent que cette navette autonome (ou sa petite sœur) a déjà été testée… à Nantes. Lors de l’opération, elle aussi, exemplaire et baptisée à grands frais Complètement Nantes, cette première navette a circulé, en juin 2018, entre la station Gare maritime et la carrière Misery. Un parcours de 650 mètres effectué à la vitesse moyenne, proprement affolante, de 10km/heure ! Selon les chiffres de Nantes- Métropole, non vérifiables donc incontestables, l’engin aurait ainsi transporté, en un mois, 5 200 personnes. Un franc succès puisque ce chiffre a été obtenu en 1029 voyages. Ce qui nous fait donc un peu plus de 5 passagers par voyage – et 669 km parcourus, l’équivalent de 15,5 fois le tour du périphérique nantais.

Il y a donc près d’un an, Nantes inventait déjà “les transports de demain”. Autant dire que cette navette autonome 2019, “sans chauffeur et 100% électrique”, a des allures de déjà vue. Reste qu’il s’agit, cette fois, de la tester dans “des conditions de circulation réelle”. Second roulement de tambour dont la presse est chargée de se faire l’écho. Et puisqu’il s’agit d’aller toujours plus loin, cette année, l’expérimentation quitte les quais de Loire pour la zone d’activités aéroportuaires. Ces nouveaux tests sont censés valider “quatre innovations” techniques, présentées dans le communiqué officiel.

Toute cette littérature nous ferait presque oublier que Nantes a déjà quelques longueurs de retard concernant ce mode de transport. Des navettes autonomes circulent déjà dans plusieurs villes de France. Sans parler de celles qui sont en circulation aux Etats-Unis. C’est dans le Michigan que le constructeur français Navya a testé sa navette en 2016. Avant sa mise en service à Las Vegas. On trouve également des navettes autonomes à Sydney ou Singapour ce qui a dû échapper à Francky Trichet, le “monsieur tech” de Johanna Rolland.

Ce qui n’empêche pas les “cocoricos” franco-français. Au printemps 2017, Anne Hidalgo se félicitait d’une “première mondiale” et d’une “révolution des transports” en présentant la navette autonome de La Défense. L’automne dernier, c’est l’agglomération lyonnaise qui annonçait “une première expérimentation d’une navette autonome en route ouverte”. Et cette navette lyonnaise, circulant à 25km/heure (contre 20 à celle de Nantes !) pouvait profiter de l’expérience d’une autre navette, elle aussi lyonnaise, mise en circulation en… 2016, pour relier le quartier Confluence. Libération parlait alors d’une “première mondiale”.

Conclusion : à défaut d’inventer vraiment “les transports de demain”, Nantes Métropole pourrait en faire un peu plus concernant les transports d’aujourd’hui. Ce qui ne serait pas si mal.

Julien Craque

La longévité nourrit la créativité

Il y a Grand débat et Grand débat. Celui qui voit le président de la République occuper largement l’espace médiatique et, à Nantes, celui qui va son petit bonhomme de chemin sur un site web municipal. Dame, un débat sur la Longévité, n’inspire pas forcément un bouillonnement d’idées. Il semble même qu’il reste confidentiel pour beaucoup de gens.

Il suffit pourtant de lever les yeux en longeant le cours des 50 otages : depuis la mi-janvier, des bannières vert pomme y aguichent le passant avec ce slogan du meilleur goût pour un débat sur le vieillissement : « Et si on gardait le meilleur pour la fin ? » Comme disait un notaire cynique d’un client disparu : « Ce qu’il y avait de meilleur en lui, c’était son héritage ».

Au bout d’un mois, neuf propositions ont été déposées sur le site ; elles ont suscité au total sept commentaires. Comment se fait-il que les élus du conseil de Nantes Métropole ne s’empressent pas tous d’apporter au débat leurs meilleures idées ? Ils ont pourtant décidé son ouverture à l’unanimité dans leur séance de décembre.

Dommage. On aimerait connaître leur avis, par exemple, sur la proposition d’une « Dementia Frendly Communauty » (sic). Les organisateurs ont sagement prévu une « corbeille » où seraient jetées « les contributions qui ne respectent pas la charte et qui ont fait l’objet d’une modération », mais qui resteraient tout de même visibles (couvrez ce sein que je ne saurais voir). Hélas pour les amateurs de pipi-caca-boudin, elle contient zéro contribution à ce jour.

Si la participation est minuscule, les spécialistes municipaux du « dialogue citoyen », eux, ont fait les choses en grand. Ils ont rédigé une charte, ouvert un site web, organisé des réunions locales. Ils se sont creusé les méninges en imaginant non pas un débat unique mais six débats correspondant à six « communautés » : les Historiens de l’art, les Ecrivains, les Cinéphiles, les Arpenteurs, les Veilleurs, les Observateurs, les Créateurs. Ces derniers sont invités à participer à « la création d’un espace d’exposition (type showroom) » et jeu de plateau avec « modélisation en 3 dimensions (type escape game) ». Tant de créativité pour si peu de débat…

Cependant, rien n’est perdu : le débat est ouvert jusqu’au mois de mai. Allez, allez, les citoyens amateurs de showroom et d’escape game, on se dépêche.

Sven Jelure

Match nul à La Beaujoire

Madame La Maire – Johanna Rolland – vient de siffler la fin du match. Après avoir défendu bec et ongles, contres vents et marées, le projet de nouveau stade de Waldemar Kita, voilà qu’elle nous dit aujourd’hui : “l’annonce d’une enquête préliminaire du parquet national financier visant la situation fiscale de M. Kita rend impossible la cession d’un terrain à son profit.”

Johanna et les Pieds nickelés

Kita hors-jeu, quelle aubaine pour la Maire qui sort le carton rouge. Dans ses rêves les plus fous où elle rejouait le match, jamais elle n’avait imaginé meilleure occasion d’enterrer définitivement un projet fumant. Contesté de partout, ce projet de YelloPark avait révolté les riverains, mobilisé les opposants et fragilisé durablement la majorité municipale. À tel point que Madame La Maire prenait le risque de ne pas être réélue parce qu’il lui fallait assumer d’avoir voulu changer les règles du jeu à la nantaise, ce qui entachait du même coup sa “nouvelle gouvernance”.

Alors Nantes plus s’interroge. Certes, riverains, citoyens et élus opposés au projet n’oublieront pas les crochets, dégagements, tacles, relances et récupérations qui ont entouré le projet, ni le nom de ceux qui ont joué pour le YelloPark. Mais s’il n’est pas certain que Johanna Rolland connaisse la profondeur de sa surface de réparation, réalise-t-elle qu’elle relègue Nantes du côté du ventre mou. Ou peut-être pire, en deuxième division !

En voyant double avec ce projet hallucinant de deux stades côte à côte à La Beaujoire, Johanna Rolland avait trouvé le moyen de souligner la singularité nantaise. Elle donnait même raison au surréaliste André Breton ! Et maintenant, elle renie jusqu’au pas de côté de Jean Blaise et du Voyage à Nantes. À quand le retour à la belle endormie des bords de Loire ?

Jules Verbe